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Critique d'album

The Offspring


Americana


(17/11/1998 - Columbia Records - Punk-Rock Californien - Genre : Ska / Punk)
Produit par

1- Welcome / 2- Have You Ever / 3- Staring at the Sun / 4- Pretty Fly (For a White Guy) / 5- The Kids Aren't Alright / 6- Feelings / 7- She's Got Issues / 8- Walla Walla / 9- The End of the Line / 10- No Brakes / 11- Why Don't You Get a Job? / 12- Americana / 13- Pay the Man
Note de 4/5
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Note de 3.0/5 pour cet album
"Retour sur l'un des plus retentissants hold-up de la dernière décennie."
Nicolas, le 08/09/2009
( mots)

Ah, Americana ! Probablement le plus beau hold-up jamais réalisé par un groupe de rock sur la jeunesse de son époque, pas moins. Avec ses 14 millions de copies écoulées de par le monde, ce disque se situe parmi les plus gros poids lourds des années 90, égalant presque les 16 millions d'exemplaires de son imbitable modèle Smash. Au delà de la simple critique d'album, c'est à une cinglante chronique sociétale doublée d'une véritable analyse marketing que nous sommes conviés ici. Car pour comprendre comment ce disque a réussi à rencontrer un succès aussi phénoménal, une petite digression extra-musicale s'impose.

Remontons le temps de quelques années. Lorsque Smash déboule dans les bacs en 1994, toutes les conditions sont réunies pour que l'album soit un carton retentissant. Inutile de revenir en long, en large et en travers sur le suicide de Kurt Cobain, sur la brutale désaffection des jeunes à l'égard d'un grunge qui ne passionnait plus outre mesure, ni sur le besoin quasi maladif des médias spécialisés (MTV en tête) de se trouver de nouveaux chevaux de bataille aptes à caracoler dans les cœurs de nos pauvres adolescents orphelins. Et voilà que The Offspring passe justement par là avec un album bigrement bien foutu, débordant d'énergie et de rythmiques montées sur 500cc, regorgeant de mélodies simplissimes qu'il faisait bon ahaner à tue-tête tout en effectuant un heelflip inversé, et de surcroît blindé jusqu'à la moelle d'interjections salaces propres à scandaliser les plus patientes des mères de famille dépassées par leur progéniture (alias "offspring" dans la langue de Shakespeare). Allez, reconnaissez-le, vous aussi, vous vous êtes gargarisés de "motherfuckers" gueulés à plein poumons dans le dos de vos parents au son de cette galette-exutoire ! Cerise sur le gâteau, Smash contient trois méga-tubes en puissance, raison supplémentaire de balancer sur toutes les ondes radiophoniques et télévisuelles Dexter Holland et sa bande de joyeux branleurs. Peu importe si le niveau d'écriture frôle le zéro absolu et si toute velléité contestataire a déserté le répertoire de ces punk-rockeurs nouvelle génération : les djeuns des 90's n'avaient déjà plus aucune aspiration politique ni sociale, préférant se vautrer dans une existence hédoniste plutôt que de faire face à une crise économique qui allait tous les catapulter dans le chômage de masse et la précarité quelques années plus tard. Alors, enjoy yourself, live the present time and fuck off the shit, dude !

Jusqu'ici, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Sauf qu'il a bien fallu que les Offspring transforment leur essai gagnant, et là les choses ont commencé à se compliquer. L'album suivant, Ixnay On The Ombre, tente de relatives innovations qui déroutent le grand public, tandis que les fans hardcore font payer au groupe son départ d'Epitaph pour Columbia. Le disque est assez largement boudé et se vend trois fois moins que son prédécesseur. Malaise. L'analyse de cet échec relatif est rapidement effectué par un Dexter Holland des plus pragmatiques : le public souhaite seulement consommer un Smash 2, ni plus, ni moins. Et ça, n'en déplaise aux défenseurs inconditionnels du groupe, ça n'est que la stricte vérité, l'intéressé n'ayant pas hésité à balancer cette déclaration ahurissante à la moindre interview qu'il a donnée à l'époque. Qu'à cela ne tienne : les quatre punk-rockeurs d'Orange County vont offrir à leurs troupes ce qu'ils désirent, et ce sans perdre une minute. Moins d'un an après la sortie d'Ixnay, Americana déboule dans les bacs et caracole très vite en tête des ventes. CQFD, pourrait-on dire. Mais c'est là que le côté vicieux de la chose finit par rejaillir. En effet, comme on l'a vu plus haut, Smash n'a pas du tout été calibré pour le succès, celui-ci n'étant survenu qu'à la faveur d'un extraordinaire concours de circonstance. A l'inverse, Americana a été clairement conçu pour reproduire le triomphe monstre de son modèle, cela ne fait aucun doute. De fait, cet album représente la boite de Pandore de toute une génération pop-punk qui germera sur ce terreau nauséabond et qui cherchera, par le biais d'une recette savamment et rigoureusement appliquée, à reproduire le succès phénoménal de cette galette.

Dans les faits, The Offspring a eu chaud aux fesses. Alors que ses grands rivaux de Green Day venaient d'entamer une longue traversée du désert parce que Billie Joe Armstrong avait justement refusé de servir au public ce qu'il lui demandait, le groupe assoyait aussi éhontément que durablement son emprise sur la jeune génération en réalisant un simple copier-coller du sacro-saint best-seller radiographique. Vous en doutez ? Pourtant, l'auto-plagiat saute immédiatement aux oreilles tellement il s'avère énorme. Même introduction parlée, même conclusion semi-instrumentale augmentée d'un morceau caché ; même guitare, même rythmique et mêmes motifs mélodiques sur le titre introductif ("Have You Ever" / "Nitro") ; même alternance voie crue / riffs secs ponctuée d'un côté par un cinglant "Motherfucker !!!" et de l'autre par un libératoire "We're gonna fuck yaaa !!!" ("Americana" / "Bad Habit") ; même single avec interludes parlés, couplets rappés et riffs rigoureusement décalqués ("Pretty Fly (For A White Guy)" / "Come Out And Play") ; même rush punk-rock enfiévré sur fond de cordes saccadées ("Feelings" / "Genocide") ; même partition de guitare hachée à forte dynamique ("No Brakes" / "It'll Be A Long Time")... on va s'arrêter là, question de retenue. Une fois ce vice de fabrication mis en évidence, on en vient presque à vouloir aller dans le sens des faussaires et à rechercher toujours plus de Smash, un peu comme la victime d'un ravisseur pervers qui serait atteint du syndrome de Stockholm. Hélas, dans sa fièvre copieuse, Holland a au passage oublié de dupliquer quelques pépites de son manuscrit original, notamment le ska débridé de "What Happened To You" ou encore la charge quasiment métal de "Killboy Powerhead", sans même parler des excellents singles que sont "Self Esteem" et "Gotta Get Away". Et si en plus on ajoute au clone quelques rengaines naïves, du genre "She's Got Issues" ou encore "Why Don't You Get A Job?" - cette dernière détenant la palme du plus sérieux potentiel d'exaspération radiophonique - le constat n'a rien de bien reluisant, c'est le moins qu'on puisse dire.

Et pourtant, l'album est bon, indéniablement, et ce pour une simple et bonne raison : les Offspring sont les rois de la mélodie immédiate, du tube archi-calibré et du refrain qui tue. Même si Smash est bel et bien présent dans notre esprit à l'écoute de cet album, on ne peut s'empêcher d'être une fois de plus emporté par la simplicité et l'allant de cette brochette de tirades bourines mises en orbite géostationnaire. Peu importe, alors, que les quatre zigotos nous ressortent strictement le même produit que quatre ans auparavant : tant qu'on pourra se gargariser du road-movie musical assaisonné au tabasco qu'est "The Kids Aren't Allright", tant qu'on pourra pogotter comme des fous sur le bondissant "Walla Walla", ou encore tant qu'on pourra hurler à perdre haleine des "hohohohoho" débridés au son de "The End Of The Line", on sera prêt à passer pour le plus sincère des amnésiques. Et on aura même droit en bonus à un morceau étrange et halluciné, "Pay The Man", timide incursion en territoire psychédélique d'un groupe qui a certainement dans ces cartons des morceaux tout aussi atypiques, mais qui n'ose pas les exposer au grand jour de peur de faire fuir le client...

Reste néanmoins une question cruciale : comment diable ces bougres de californiens ont-ils réussi le tour de passe-passe de refourguer au même public deux fois le même album ? La réponse, si elle n'est pas aussi univoque qu'on pourrait le croire, repose sur un constat pourtant assez limpide : le public n'est pas le même, justement. Pas tout à fait, pour être exact : si quatre ans séparent Smash et Americana, la masse adolescente, cible de prédilection du punk-rock (et quelques années plus tard, du pop-punk à la Good Charlotte), a eu le temps de mûrir, et ce sont donc les petits frères qui ont eu tout loisir de jeter leur dévolu sur la nouvelle mouture de Noodle and co. De là à affirmer qu'on n'apprécie The Offspring que durant quelques années de l'adolescence pour ne plus jamais y revenir par la suite, il n'y a qu'un pas... qu'on laissera à chacun le soin de franchir en son âme et conscience.

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