Premiata Forneria Marconi
L'Isola Di Niente
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1- L'Isola Di Niente / 2- Is My Face On Straight / 3- La Luna Nuova / 4- Dolcissima Maria / 5- Via Lumière
En 1972, Premiata Forneria Marconi avait mis au monde deux albums qui témoignaient déjà d’une réelle progression en à peine quelques mois : la légèreté de Storia di un minuto était suivie par la richesse et la complexité de l’immense Per un amico. Le groupe s’était ainsi fait un nom au sein de la scène italienne, lui permettant d’intégrer dans la postérité la trinité sacrée de la péninsule (avec Le Orme et Banco del Mutuo Soccorso), mais il aspirait à une reconnaissance internationale. Aidé par ELP qui avait remarqué le combo lors d’une tournée en Italie, mais surtout par Peter Sinfield qui accepte d’écrire les paroles en anglais pour leurs compositions, que PFM Photos of Ghosts en 1973, compilation de morceaux traduits dans la langue de Shakespeare : sans être toujours heureuse, la pratique était courante en Italie et en Europe non-anglophone pour les formations qui espéraient conquérir l’Angleterre et les États-Unis.
De cette étape, demeure deux héritages au sein de leur troisième album L’Isola di niente, qui est sans aucun doute leur meilleure production et l’un des grands jalons du Rock Progressif Italien (RPI). D’une part, la forte influence du rock progressif anglais qui inspire comme jamais les compositions du groupe : Yes, Gentle Giant et ELP viendront régulièrement à l’esprit de l’auditeur attentif. D’autre part, Peter Sinfield participe activement à la création d’"Is My Face on Straight", une pièce alambiquée aux variations et aux relents yessiens (notamment à la guitare), qui comportent de nombreuses originalités comme de belles interventions de flûte ou un solo d’accordéon.
L’album est nettement plus orienté vers le rock progressif symphonique, en témoigne le triomphal "L’Isola di niente" qui ouvre l’album avec dix minutes magistrales : les chœurs introductifs (aux claviers) laissent fondre l’opéra vers les riffs électriques et les phrasés de Mussida, guitariste qui se montre en tout point remarquable sur cet opus. Les élans instrumentaux de la deuxième partie ne peuvent que combler l’amateur le plus intransigeant du genre, que ce soit lors des parties les plus dynamiques ou les plus heavy. S’inscrivant dans un même registre, la triomphal "La Luna Nuova", s’il évoque également Yes dans un second temps, commence par une introduction à la Gentle Giant pour dérouler un rock progressif typhique qui doit aussi bien aux mélodies issues du répertoire de la musique savante nationale qu’aux divagations jazzy complexes – là encore, les interventions de guitare sont assez merveilleuses.
Mais le groupe sait faire preuve d’éclectisme et d’audace. "Via lumiere" confirme que l’arrivée du Français Patrick Djivas, débauché de chez Area, n’est pas sans conséquence : ses démonstrations à la basse sont au service d’une composition très jazz-rock et sous influence canterburyenne, jusqu’au final absolument symphonique. Enfin, notons la petite ballade "Dolcissima Maria", toute en douceur (et en mièvrerie, surtout dans son final instrumental), qui reste un incontournable de tout album de RPI qui se respecte.
En 1974, Premiata Forneria Marconi conclut donc sa trilogie historique avec une nouvelle pièce admirable, dernier grand acte du premier âge de la scène italienne avant que le groupe ne choisisse le chemin d’une évolution musicale marquée par l’arrivée au chant de Bernardo Lanzetti d’Acqua Fragile et par leur transformation en groupe anglophone.
À écouter : "L’Isola di niente", "La Luna Nuova"