Nick Cave & The Bad Seeds
Salle : Sportpaleis Antwerpen (Anvers (Belgique))
Première partie :
Amitié (solid as a) rock
Mon amitié avec le Docteur Futurity (c’est un pseudonyme) s’est nouée quinze jours après Woodtsock, c’est à dire il y a 55 ans. En amour, on parlerait de noces d’orchidée. En amitié, il n’y a pas de mots. Peut-être parce que l’amitié se passe de fleurs et de symboles.
Le Docteur Futurity est fan de films abscons (qu’il dénomme "films autres"), de Uriah Heep , de Bruce Springsteen , de Tinariwen, d’Arcade Fire, ...
Il aime aussi les artistes plus divergents, comme P.J. Harvey ou… Nick Cave.
Justement, Nick Cave passait au Sportpaleis d’Anvers (la plus grande salle belge) ce 31 octobre 2024, lors de la soirée d’Halloween.
Devant 19.999 spectateurs lambda et mon énigmatique ami (incognito au cœur de la foule).
Définition du contexte
Il y a quelques jours, le Docteur Futurity et moi-même évoquions précisément cet état de fait nouveau : des artistes "alternatifs" remplissent des salles populaires où ne défilent d’ordinaire que les plus "gros" groupes mainstream. Ca a, par exemple, été récemment le cas pour P.J. Harvey dont on peut dire qu’elle propose tout sauf une approche musicale "facile".
C’est maintenant au tour de Nick Cave. Évidemment, on pourra toujours dire que l’Australien a fait un pas vers un public plus large en publiant Wild God, un album imparfait mais certainement plus accessible que Ghosteen, son interminable (et, en ce qui me concerne, insupportable) encyclopédie des idées noires.
Je ne trahirai pas un demi siècle d’amitié en révélant qu’il est rare de lire plus de quatre lignes rédigées d’affilée par le Docteur Futurity qui affecte d’ordinaire un self control et un sens du raccourci dignes de l’inénarrable Philip E.A. Mortimer.
Alors, le message que j’ai reçu durant la nuit du 31 octobre au 1novembre 2024 m’a sidéré. Je le livre aux petits rockers dans tout son délire. Il aurait été dommage que le meilleur concert rock de 2024 en Belgique soit passé sous silence...
Nick Cave
Je rentre après 2h15 (ou 2h30) de concert. Nick Cave and The Bad Seeds. Je me tiens la joue. Non, je me tiens les deux joues ! Comme quelqu’un qui vient de se prendre au moins deux baffes dans la gueule (1).
C’est très violent. Surtout quand on ne s’y attend pas !
La surprise est de taille. C’était extra-ordinaire (sic). Imprévisible. Nick Cave a transcendé (presque) tous ses titres en public (2). Il a fait preuve d’une énergie permanente et insoupçonnable. Dans la veine de Bruce Springsteen. Le groupe et les choristes sont extraordinairement homogènes et le chef d’orchestre Warren Ellis (3) est complètement fou !
A priori, l’apparence plutôt froide de Nick Cave ne permet pas de soupçonner sa capacité à tisser des contacts humains chaleureux. Pourtant, à certains moments, les rythmes et la musique sont devenus carrément tribaux. Envoûtants. C’est le bon mot : l’envoûtement était garanti. Avec des moments immenses, faits d’émotions et de frissons invraisemblables.
Il n’y a guère eu de passages faibles durant le show. Même les morceaux plus dépouillés (piano, voix) présentaient une dimension spectaculaire. Les meilleurs titres étaient supérieurs à leurs version studio en raison de l’intensité de l’interprétation et de la force vitale (ou « vivante ») du groupe et de ses choristes.
Les deux versions les plus hallucinées concernaient "Tupelo" (où Cave met en scène la naissance d’Elvis Presley) et "Carnage" (dont le seul titre laisse deviner le chaos scénique auquel le public a été confronté).
Waouw ! Waouw ! Et encore Waouw !
Set-List
Frogs
Wild God
O Children
Jubilee Street
From Her To Eternity
Long Dark Night
Cinnamon Horses
Tupelo
Conversion
Bright Horses
Joy
I Need You
Carnage
Final Rescue Attempt
Red Right Hand
The Mercy Seat
White Elefant
Encore 1
O Wow O Wow (How Wonderful She Is)
Papa Won’t Leave You, Henry
The Weeping Song
Encore 2
Into My Arms
(1) Mise en garde : évitez d’imiter le Docteur Futurity qui conduit sa voiture sans tenir le volant.
(2) Il est utile de rappeler que les 18 albums de l’Australien avec ses mauvaises graines couvrent désormais 40 années de galères et de succès divers.
(3) Il n’est pas inconvenant de dire que Warren Ellis, multi-instrumentiste et chef d’orchestre redoutable, est le grand ordonnateur de la musique de Nick Cave, en studio comme en concert.