↓ MENU
Accueil
Première écoute
Albums
Concerts
Cinéma
DVD
Livres
Dossiers
Interviews
Festivals
Actualités
Médias
Agenda concerts
Sorties d'albums
The Wall
Sélection
Photos
Webcasts
Chroniques § Dossiers § Infos § Bonus
X

Newsletter Albumrock


Restez informé des dernières publications, inscrivez-vous à notre newsletter bimensuelle.
Compte-rendu de concert

Muse


Date : 29/02/2016
Salle : Bercy (POPB) (Paris)
Première partie : Phantogram

Longtemps élevé au rang de groupe superstar, Muse avait su au cours de la décennie passée défendre avec brio son titre de meilleur groupe live en activité. Sauf qu'après avoir perdu le feu sur disque et avoir manqué avec Drones un retour aux sources fièrement annoncé, Matthew Bellamy, Chris Wolstenholme et Dom Howard sont finalement tombés du piédestal duquel on les pensait indétrônables. Ça ne va pas vous plaire, mais c'est un fait : Muse a perdu le mojo.

Alan, le 07/03/2016
( mots)
Le trio de Teignmouth a cette particularité de susciter quelque chose allant au-delà de la simple opinion, chez ses fans comme chez ses détracteurs. On évoquerait plutôt ici une conviction passionnelle et viscérale, presqu’idéologique et qui le plus souvent flirte avec les souvenirs et les émotions les plus personnels, voire même les plus intimes, de - au hasard - n’importe quel chroniqueur live pour un webzine indépendant : Muse est certainement, au même titre que Nirvana et les Red Hot, l’un des groupes les plus importants de mon adolescence - et Dieu sait qu’aussi honteuse eût-elle été, personne ne saurait prendre à la légère une période aussi essentielle au développement et à l’épanouissement de chacun.
 
Ainsi, tout comme Nevermind ou Blood Sugar Sex Magik, Origin of Symmetry et Absolution comptent parmi les premières galettes payées de ma poche à avoir rejoint ma discothèque. Mon éveil musical s’est fait à l’écoute de “New Born” et autres “Stockholm Syndrome”, et dix ans durant j’ai suivi ce groupe jusque dans ses égarements les plus calamiteux - la BO de Twilight, on en reparle ou bien ? Jusqu’alors, j’avais su tout leur pardonner, prétextant comme beaucoup que tant que Muse saurait rester une bête, que dis-je, un monstre lors de ses passages sur scène, j’étais prêt à passer l’éponge sur n’importe quelle incartade discographique servie par Matthew Bellamy.
 
Sauf que pour la première fois en dix ans, j’ai assisté à l’impensable : longtemps étiqueté comme l’un des meilleurs groupes live à tourner de nos jours, Muse a pourtant délivré en ce jour intercalaire un show bancal, entre fulgurances manifestes et maladresses paresseuses, loin de la grande époque des concerts dantesques auxquels le groupe nous avait habitués par le passé. Constat aussi chagrinant qu’irréfutable, Muse n’est en 2016 plus digne de son statut et semble avoir entamé, après une lente descente aux enfers sur disque, une chute inexorable vers la norme, vers le correct, après des années à avoir surfé sur l’épique et le mémorable. Mon cœur se brise encore davantage à l’écriture de ces mots, mais il est temps de se rendre à l’évidence : Muse a perdu le mojo
 
The world is a stage
 
D’un autre côté, cette déchéance était-elle si imprévisible qu’on veut bien le croire ? Après tout, voilà près de quinze ans que Matthew Bellamy nous assomme avec des soi-disant concepts piochant à foison dans la dystopie orwellienne, l’asservissement par les machines ou encore la SF uchronique. Avec du recul, il paraît même miraculeux que Muse, non pas le groupe de studio mais le monstre du live, ne se soit pas empêtré plus tôt dans ses fumisteries conceptuelles. Et tandis qu’on nous annonçait en amont de la tournée un spectacle comparable à The Wall de Pink Floyd, on supposait que l’excentrique frontman, dont la mégalomanie n’a jamais autant transparu qu’au travers d’une scénographie à la géniale démesure, avait alors dans ses valises un show tout bonnement révolutionnaire - ou simplement une sacrée paire de couilles - pour s'autoriser une telle analogie. Et puis dans le fond, pourquoi pas ? Parce qu’après tout, avec trois gigantesques colonnes de LEDs ou une scène pyramidale colossale, les tournées associées à The Resistance et The 2nd Law n’avaient pas à rougir de leur stage design tout bonnement époustouflant.
 
On ne tarde pourtant pas à déchanter à la découverte d’un ersatz de la “griffe” du 360° Tour de U2, les piliers en moins : la scène centrale fait ici pâle figure face à la démesure de moyens déployée pour celles conçues pour les tournées précédentes, et ce malgré l’écran circulaire ou la rangée de drones qui la surplombent. C’est d’ailleurs sur le morceau du même nom - probablement le plus dispensable de tout le catalogue du groupe - que ceux-ci se déploient et viennent virevolter dans la salle, chauffant le public à blanc avant l’arrivée du groupe. Le ballet des machines volantes interpelle et fait sourire, et on pense tout d’abord à une véritable idée de mise en scène novatrice et prometteuse. Et tandis que les hostilités sont déclarées d’entrée de jeu avec un “Psycho” ravageur, on réalise pourtant bien assez vite qu’il ne s’agira là que d’un gimmick ponctuel et sous-exploité, les drones passant la majorité de la soirée rangés bien au chaud et n’apparaissant qu’en de trop rares occasions - le jeu de lumières se voulant pourtant saisissant à chaque fois, en témoigne un “Supermassive Black Hole” délirant aux airs de psycho-trip futuroïde.
 
D’idées, Muse n’en manque pourtant pas. On est ainsi bluffé par le jeu de marionnettes opéré lors de “The Handler”, Bellamy et Wolstenholme endossant le rôle de pantins manipulés par le personnage-titre : s’opère alors sur des voiles déployés pour l’occasion un jeu de projections à la précision stupéfiante. Il ne s’agira pourtant que d’un bref éclat d’originalité au milieu d’un spectacle se limitant quasiment au seul va-et-vient du bassiste et du chanteur d’une extrémité à l’autre de la scène, ceux-ci peinant d’ailleurs à occuper convenablement l’immense espace scénique offert par cette dernière. Pire, en déléguant ses parties de guitare à Morgan Nicholls - sagement planqué derrière son collègue batteur au centre de la scène - sur “Starlight” et “Uprising”, Bellamy voit son aura totalement se dissiper et arpente la scène, l’air penaud, sans trop savoir quoi faire de ses mains. Bien loin des prestations enragées de l’ère Absolution, dont le cultissime live à Earls Court constitue un témoignage inestimable, le show se veut ici convenu et calibré pour le plus grand nombre, celui-ci s’affranchissant notamment des codes inhérents à la procession du live made in Muse et balayant de ce fait tout un pan de la mythologie du groupe pourtant instaurée en premier lieu.
 
Carte d'une épineuse problématique
 
Ainsi, tel un schizophrène désabusé, on se surprend à vibrer avec émotion à l’exécution impeccable et endiablée de morceaux aussi iconiques que “Plug in Baby”, “Time Is Running Out” ou “Knights of Cydonia” tout en conspuant les facéties absconses d’une setlist saugrenue. Il est en effet difficile de ne pas s’indigner du choix de certaines chansons, mais surtout de leur ordre et de leur agencement : “Plug in Baby” se voit ainsi expédié au bout de seulement dix minutes de set, “Supremacy” fait monter la sauce avant un temps mort malvenu imposé par un “Isolated System” inopportun, et l’hymnique “Starlight”, au cours duquel intervient par ailleurs un lâcher de “hullabaloons” bizarrement prématuré, se voit associé de manière on ne peut plus artificielle à un “Prelude” aussi incompatible que maladroit. Le set, qui comporte pourtant de nombreux temps forts, se voit ici plombé par de trop nombreuses incohérences venant briser le rythme d’un concert s'annonçant pourtant sensationnel sur le papier.
 
Car quoi qu’on en dise, Muse est toujours capable d’étonner, d’émoustiller, d’émerveiller même ; et tant pis si seuls les aficionados eurent la chair de poule à l’écoute du riff métallique de “Citizen Erased”, mais toujours est-il que la pièce maîtresse d’Origin of Symmetry résonna comme une déclaration d’amour au spectateur, un moment à l’intensité rare aussi inespéré que jubilatoire. C’est pourtant sur une pointe d’amertume que celle-ci se termine, puisque “Citizen” fera figure avec “Plug in Baby” d’unique rescapé pré-Absolution. Ni “Bliss”, ni “Muscle Museum”, ni même le pourtant incontournable “New Born” ne parviendront à se frayer un chemin jusque dans le set, le chef-d’œuvre intemporel de Muse semblant suivre la regrettable trajectoire de son prédécesseur, tragiquement occulté en concert depuis maintenant bien trop longtemps. 
 
Et c’est alors que l’on remarque soudainement à quel point “Hysteria” brille par son absence que Muse choisit de clôturer son set avec “The Globalist” en lieu et place de, complètement au hasard, “Stockholm Syndrome” : de par ses longueurs et sa structure décousue, le morceau peine franchement à décoller et se veut tout bonnement incapable de conclure convenablement un set pourtant déjà inégal. C’est malgré tout sous les applaudissements que le groupe s’éclipse, faisant place une toute dernière fois au ballet de drones tandis que résonne de nouveau dans la salle la cantique polyphonique qui ouvrait plus tôt les festivités. Habituellement connu pour ses rappels multiples, c’est cette fois-ci pour un maigre rappel de seulement deux chansons que Muse remonte sur scène, entamant les dernières minutes avec un “Mercy” d’autant plus guimauvesque que celui-ci se voit repris en chœur par près de vingt mille personnes. Il était une fois dans l’Ouest s’invite heureusement à la fête et annonce l’épique cavalcade caractéristique de “Knights of Cydonia” qui, comme toujours, termine la soirée sur un rush final majestueux après deux heures d’un concert en dents de scie - chose qu’on n’aurait jamais osé imaginer de la part de Muse il y a encore… un an ?
 
Des années durant, ils étaient au sommet. Aux commandes d’une machinerie itinérante hors-norme, Muse avait su mettre le monde à genoux avec des superproductions live aussi grandiloquentes qu’éblouissantes. Dix ans plus tard, alors qu’il est en lice pour le titre de “groupe de rock fétiche de ceux qui n’en écoutent pas” face à Coldplay, Muse s’acquitte de prestations certes supérieures aux productions actuelles, mais terriblement fades et en-deçà des illustres concerts proposés auparavant. Englué dans une thématique qui échoue ici à enrichir durablement le spectacle, Muse peine à convaincre les initiés. Et tandis que les néophytes seront subjugués, les autres resteront sur leur faim, regrettant l’époque où Matthew Bellamy et ses comparses étaient effectivement les rois du monde. L’année dernière, je voyais un groupe à la hargne revigorée monter sur scène. Pensant dur comme fer assister au prélude d’une tournée somptueuse, j’ai réalisé soudainement près de dix mois plus tard, non pas que je m'étais trompé, mais que c’est bien une part essentielle de mon adolescence qui a disparu. Et honnêtement, ça fait chier.

Setlist : 1. Psycho - 2. Dead Inside - 3. Plug in Baby - 4. Supremacy - 5. Isolated System - 6. The Handler - 7. Stockholm Syndrome - 8. Supermassive Black Hole - 9. Prelude - 10. Starlight - 11. Citizen Erased - 12. Munich Jam - 13. Madness - 14. Undisclosed Desires - 15. Reapers - 16. Time Is Running Out - 17. Uprising - 18. The Globalist

Rappel : 19. Mercy - 20. Man with a Harmonica - 21. Knights of Cydonia
Commentaires
Alan, le 09/03/2016 à 10:37
J'étais présent à Bercy les deux soirs en décembre 2006, et depuis j'ai revu le groupe pas mal de fois - à vrai dire c'était la septième fois que je les voyais la semaine dernière. Pas mal de monde a invoqué l'argument de la lassitude et de la redondance pour expliquer mon ressenti sur le concert. Je ne le vois pas du tout comme ça, au contraire : c'est justement parce que j'ai vu Muse à de multiples reprises sur une période de dix ans que je pense livrer une interprétation honnête et relativement exacte de ce concert, parce que j'ai un certain nombre de références en la matière (sans même tenir compte des concerts donnés à L'Olympia et au Webster Hall qui sont clairement hors-concours). Après, j'aurais pu faire comme toi le choix de ne pas retourner voir Muse et rester sur le souvenir d'une prestation endiablée - mais c'est pas comme ça que je fonctionne, j'aime trop les concerts. De toute manière, avec sept concerts de Muse à mon tableau de chasse, je pense être on ne peut plus légitime pour clamer haut et fort que ouais, n'en déplaise aux fans les plus virulents : Muse c'était mieux avant.
Raphaelle, le 09/03/2016 à 10:21
Souvenir ému également en 2006 d'un Bercy plein à craquer et complètement survolté. Je ne suis jamais retournée voir Muse pour ne pas ternir cette image et visiblement c'était la bonne chose à faire... Quelle tristesse... Ceci dit, on ne pourra pas prétendre qu'on ne s'y attendait pas du tout.
Tyler, le 08/03/2016 à 23:51
C'était mon 1er concert de Muse et je pense que ça sera le dernier. J'ai eu la désagréable impression d'écouter les albums avec d'autres auditeurs qui applaudissaient an la fin de chaque piste. Muse nous a sorti les titres note pour note, aucune impro, même les voix étaient identiques aux albums. Le groupe ne donne pas l'impression d'être soudé, chacun est dans son coin, Bellamy s'amuse un peu à la guitare au début des morceaux et les autres attendent le top pour commencer. J'ai eu cette impression d'être devant un spectacle son et lumière alors que je venais pour un concert. La discographie de Muse regorge de titres puissants mais quasiment aucun n'ont été joué. Le comble du ridicule fut leur chant d'église qui finit de plomber un concert qui n'a définitivement pas décoller. Au vu des critiques entendues à la sortie du concert, Muse a perdu ce jour une partie de son public.
Billy31, le 08/03/2016 à 15:24
Muse a eu la niaque sur scène jusqu’à Absolution. Ensuite, ils ont pris une autre direction, celle des albums plus cadrés et des « spectacles » réglés aux petits oignons, avec peu voire aucune impro, faits pour satisfaire le plus grand nombre. C’est la même chose avec Radiohead. Faut se faire à l’idée, rien ne dure.
Nykeaula, le 07/03/2016 à 15:44
"Plug in Baby se voit expédié au bout de seulement dix minutes de set" Et encore, sur certaines dates, aucune chanson d'Origin of Symmetry n'a été jouée ! Impardonnable, bien évidemment. Les setlists de la tournée peuvent décevoir mais le groupe a toujours livré lors des concerts en salle des sets plus concis qu'en stade
Etienne, le 07/03/2016 à 11:07
N'est pas U2 qui veut !
Alan, le 07/03/2016 à 10:34
Ça fait deux live reports de suite où la date se voit modifiée suite à leur publication... Mais effectivement ça n'est définitivement pas celui du 26 vu que j'étais au Zénith ce soir là !
Nykeaula, le 07/03/2016 à 10:12
Ce n'est pas le concert du 26 mais celui du 29 ;)