White Moth Black Butterfly
Atone
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1- I: Incarnate / 2- Rising Sun / 3- Tempest / 4- An Ocean Away / 5- Symmetry / 6- II: Penitence / 7- The Sage / 8- The Serpent / 9- Atone / 10- III: Deep Earth / 11- Evelyn
En 2017 paraissait sous le label post-prog Kscope, le deuxième album du groupe White Moth Black Butterfly. Derrière ce nom mystérieux se cache Daniel Tompkins, chanteur du groupe de djent metal TesseracT. Ne cherchez pas ici des rythmiques alambiquées ou la moindre sonorité metal, car nous sommes plutôt sur une pop délicate portée par un duo de voix envoutant.
Désireux d’explorer de nouveaux horizons musicaux, Daniel Tompkins s’entoure dans un premier temps de Keshav Dhar (guitariste du groupe de metal Skyharbor). La chanteuse Jordan Bethany sera ensuite invitée pour poser sa voix angélique sur deux morceaux du premier album auto-produit "One Thousand Wings" (2013). Bien que très réussi, ce premier essai mêlant trip-hop, musique électronique et quelques touches de shoegaze, pouvait paraître assez dispersé et relativement hermétique dans ses mélodies.
Ce qui n’était à l’origine qu’un projet solo prend alors une autre tournure lorsque Jordan Bethany rejoint le groupe de manière permanente dans le cadre de l’enregistrement du deuxième album Atone, dont il est question ici.
Après l’écoute des 11 titres, l’alchimie est telle que ce duo apparaît comme une évidence.
Le nom du groupe prend également tout son sens avec cet album. Le son de White Moth Black Butterfly alterne avec aisance différents tempos, styles et ambiances. Nous faisons face à un large spectre d’émotions, naviguant continuellement entre lumière et ténèbres. Le groupe a en effet souhaité explorer dans cet album des thèmes comme la foi, l’espoir, le pardon ou encore la perte.
Le son d’Atone se veut également plus organique et accessible que son prédécesseur, et l’on sent qu’il y a eu une réelle réflexion pour apporter différentes textures aux morceaux. D’une part, l’album a été enregistré à travers le monde (Inde, USA et UK), ce qui peut expliquer cette variété à l’écoute. D’autre part, le groupe n’a pas lésiné sur les instruments : piano, violoncelles, percussions, harpe, cor, pipa (instrument à cordes traditionnel chinois) sont de la partie. Le tout conserve néanmoins une véritable sensation d’unité et de cohérence.
L’album s’ouvre sur le chant posé de Daniel Tompkins accompagné de piano et violons, avant d’être happé par le titre "Rising sun" qui nous accroche immédiatement avec sa ligne de basse dynamique et son refrain imparable, porté par le timbre de voix feutré si particulier de sa chanteuse. Arrive ensuite un autre moment fort de l’album avec le morceau "Tempest" qui nous invite au voyage avec une construction très cinématographique. Cet aspect est d’ailleurs particulièrement renforcé par les clips tournés dans les Highlands (Ecosse) pour la promotion de l’album. Ces deux vidéos ("Tempest" et "Evelyn") forment un mini-scénario projetant nos deux protagonistes dans des décors médiévaux et suivant une quête visant à sauver un village.
L’ambiance se fait plus sombre à partir du morceau "An Ocean Away" où l’on retrouve des arrangements électroniques se rapprochant des sonorités du premier opus. Le titre suivant "II : Penitence" tombe dans une mélancolie encore plus marquée avec un champ folklorique du plus bel effet laissant progressivement place aux bruits d’une bataille qui fait rage…
Les envolées lyriques de "The Sage" accompagnées de sonorités asiatiques nous font entrevoir de nouvelles éclaircies. Puis arrive "The Serpent", autre morceau à l’accroche immédiate, et qui pourrait au même titre que "Rising Sun", trouver facilement sa cible auprès d’un public plus large. Attention, cette accessibilité n’atténue en aucun cas l’intérêt de cette œuvre, marquée d’influences progressives subtiles mais bien présentes.
L’album se clôture sur le très réussi "Evelyn" et l’intervention d’une chanteuse classique et une rythmique crescendo.
On peut reprocher à l’album d’être un peu court et d’avoir quelques passages dispensables comme l’interlude "III : Deep Earth". Le voyage aurait gagné à être davantage étiré, ce qui aurait permis d’apporter plus d’ampleur à certains titres comme "Tempest", et un final encore plus marquant pour "Evelyn". L’album se dévoile un peu trop rapidement, ce qui peut limiter la durée de vie de cette production. Néanmoins, ne boudons pas notre plaisir à la découverte de cette pop raffinée livrée dans une production de haute facture !
Atone est une très belle surprise démontrant un réel savoir-faire d’écriture de ses auteurs. WMBB nous y propose une expérience immersive entre voyage et mélancolie, accentuée par une imagerie cinématographique qui apporte un supplément onirique à cet album. Bien qu’expérimental et imprégné des multiples influences du groupe, l’album reste très accessible et je ne saurais que vous conseiller de plonger dans cet univers. Encore sous sa forme de chrysalide, le papillon de nuit n’a pas encore montré tout son potentiel et ne demande plus qu’à éclore. Ça tombe bien, le groupe s’est lancé dans l’écriture d’un nouvel opus pendant le confinement !