↓ MENU
Accueil
Première écoute
Albums
Concerts
Cinéma
DVD
Livres
Dossiers
Interviews
Festivals
Actualités
Médias
Agenda concerts
Sorties d'albums
The Wall
Sélection
Photos
Webcasts
Chroniques § Dossiers § Infos § Bonus
X

Newsletter Albumrock


Restez informé des dernières publications, inscrivez-vous à notre newsletter bimensuelle.
Critique d'album

The Dears


No Cities Left


(15/04/2003 - MapleMusic Recordings - Rock indépendant canadien - Genre : Rock)
Produit par Murray Lightburn

1- We Can Have It / 2- Who Are You, Defenders Of The Universe? / 3- Lost in the Plot / 4- The Second Part / 5- Don't Lose the Faith / 6- Expect the Worst/'Cos She's a Tourist / 7- Pinned Together, Falling Apart / 8- Never Destroy Us / 9- Warm And Sunny Days / 10- 22: The Death Of All The Romance / 11- Postcard From Purgatory / 12- No Cities Left
Note de /5
Vous aussi, notez cet album ! (0 vote)
Consultez le barème de la colonne de droite et donnez votre note à cet album
Note de 4.0/5 pour cet album
"Ne passez pas à côté du rock sombre et romantique des Dears ! "
Quentin, le 02/12/2022
( mots)

Au tournant de l'année 2003, la scène indie rock canadienne en pleine renaissance s'apprête à subir deux déflagrations musicales en provenance de la ville de Montréal. La première est celle du groupe Arcade Fire, qui déboule avec un premier album au succès critique immédiat et retentissant et dont on connait aujourd’hui la postérité. La seconde, bien plus confidentielle, est celle du groupe the Dears qui fait paraitre cette même année un petit bijou de rock alternatif, aventureux et inclassable, empruntant ses influences tant à la britpop qu’à la soul et au rock symphonique.


En 2004, le groupe n'en est pas à son premier coup d'essai avec près de 10 ans d’existence et déjà deux albums au compteur, dont un second effort proposant une "Pop noire romantique orchestrale" tout à fait recommandable. Ce troisième opus permet cependant au groupe de passer un palier tant en termes de composition musicale que de popularité, contribuant ainsi à lever l'anonymat presque total dans lequel il était jusqu'à présent relégué. C’est notamment le début de la carrière internationale des Dears avec des premières parties assurées à la demande de Morrisey lors de sa tournée en 2004/2005 aux Etats-Unis.


A première vue, cet album a pourtant de quoi dérouter pour qui s’attend à y retrouver les formats classiques de l’indie rock. Le groupe livre des compositions complexes aux humeurs changeantes, s’adonne à des atmosphères passant abruptement de l'angoisse à l'apaisement et déclame des textes particulièrement sombres abordant les différentes facettes de l’amour contrarié. Rajoutons à cela que 8 morceaux sur 12 dépassent allégrement les 5 minutes et que le trio classique guitare/basse/batterie est complété par une instrumentation plus large (saxophone ténor et baryton, violon, violoncelle, flûte, trompette, cor d’harmonie) qui confère une coloration tantôt jazzy, tantôt symphonique à l’ensemble.


The Dears c'est avant tout une voix, et quelle voix ! Celle de son frontman, Murray A. Lightburn, seul maître à bord, qui compose, écrit les textes et dirige le line-up fluctuant des musiciens (à l'exception de Natalia Yanchak, sa femme, présente sur tous les albums et qui officie aux claviers). Une voix de bariton d'une grande intensité émotionnelle qui emprunte à la fois au maniérisme chic de Morrissey, aux intonations britpop de Damon Albarn et à la voix de velours de Neil Hannon. Influencé par le romantisme poétique des Smiths, Murray Lightburn vaut cependant bien plus que le titre de "Morrissey black" dont on l’a affublé un peu trop vite et auquel il se plait à répondre en interview, "c’est en partie vrai seulement : je suis noir". L’homme développe un style vocal propre qui dépasse celui du dandy anglais précédemment cité et qui reste convaincant aussi bien dans l'exercice du crooner romantique ("Warm and Sunny Days") que dans celui de la pop song amère ("22 : the Death of all Romance") mais également quand il déchire sa voix dans un registre soul plus intense ("Pinned Together, Falling Apart").


Du côté des compositions, les morceaux de cet album doivent être envisagées comme des constructions pensées en plusieurs actes avec des ruptures de rythmes et des crescendo particulièrement épiques. Les meilleurs titres de "No Cities Left" s’éloignent en effet des poncifs pop/rock les plus orthodoxes construits à base de couplet/refrain et s’aventurent sur les terrains de la démesure romantique : harmonies vocales fiévreuses laissant la place à des hurlements désespérés, fulgurances de guitares abrasives, orchestration lyrique que n’aurait pas renié The Divine Comedy. Tant pis si ces envolées ne pas toujours parfaitement maitrisées puisque l’émotion est au rendez-vous. C'est d'ailleurs lorsqu’ils composent des chansons dans des formats plus classiques et téléphonés ou trop dépendants de leurs influences (le trop smithien "Don’t Lose the Faith", notamment) que les Dears se révèlent les moins percutants, se complaisant dans des calibres certainement trop étroits pour eux. Mais ces moments sont heureusement fort rares sur l’ensemble de l’opus.


L’album s’ouvre tout d’abord en forme de berceuse triste-amère avec la voix chaude de Murray Lightburn sur l’introductif "We Can Have It". Le texte empreint d'une noirceur romantique évoque la rupture et le désespoir, puis le titre monte en puissance avec l’entrée en lice d’une guitare cristalline accompagnée de cordes avant de se terminer sur une triste litanie répétée a capella "it won’t ever be what we want". L'ambiance est posée. Le second titre, "Who Are You Defenders of the Universe ?", enchaine sur des accords mineurs construits autour d’une ritournelle d’arpèges acérés tandis que "Lost in the Plot", le tube rock de l’album, met à l’honneur les guitares saturées avec une petite boucle mélodique au synthétiseur qui laisse la place à un pont beaucoup plus léger.


Ces trois premiers morceaux, de bonne facture, laissent surtout transparaitre les influences britpop du groupe avant une superbe ballade intitulée "The second Part" qui traite des faux espoirs qui accompagnent la réconciliation amoureuse. La mélodie est seulement portée par la voix mélancolique du chanteur accompagnée de quelques accords de guitare sèche auxquels viennent progressivement se greffer un accordéon puis un saxophone avant une reprise du thème au piano et un déluge final clôturé par un court mais beau solo de guitares harmonisées. Mention spéciale à ce morceau dont l’instrumentation évoque les années 1980 mais qui ne se prend pas les pieds dans le piège du kitsch.


Le voyage dans les eighties se poursuit avec "Dont’ Loose the Faith" qui rappelle irrésistiblement "There Is A Light That Never Goes Out" des Smiths mais qui peine à se détacher de l’héritage des mancuniens. La suite de l’album s’avère bien plus aventureuse, à l’image du titre "Expect the Worst/Cos she’s a Tourist", et ses deux parties distinctes : la première est celle d’un opéra rock inquiétant bâti à coups d’envolées grandiloquentes et la seconde installe une atmosphère planante et apaisée dynamisée par l’intervention d’une section de cuivres. Le titre "Pinned Together, Falling Apart" évoque ensuite un slow à l'ambiance ténébreuse où le chanteur, consumé par un feu intérieur, hurle son dépit avant d’être rejoint par une guitare particulièrement incisive. Sur le morceau suivant "Never Destroy Us", les voix de Lightburn et de Natalia Yanchak s’entremêlent sur un air jazzy et une 6 cordes débridée répond à des nappes de claviers enveloppantes, avant de se terminer de manière un peu surprenante façon punk rock trash.


Pour la suite, "Warm And Sunny Days" est une belle petite pépite pop qui évoque assez facilement les meilleurs morceaux de Blur tandis que "22: The Death Of All The Romance" se la joue anti chanson d’amour à travers ce dialogue entre Murray Lightburn et Natalia Yanchak dont le final plein de pathos évoque The Divine Comedy avec son lit de violons et ses trompettes conquérantes.


Le vrai morceau progressif de l’album, "Postcard from Purgatory" balaye en presque 8 minutes et trois parties l’étendue du savoir-faire du groupe, passant d’une lourde ambiance crépusculaire à un climax dramatique tout droit sorti de la bande-son d’un western spaghetti d’Ennio Morricone puis à un rock entrainant emmené par une flûte espiègle. Du grand art. Le dernier morceau éponyme de l'album évoque quant à lui la fin du monde et termine de nous achever avec ses arpèges de guitare sèche et ses airs de saxophone chaloupés avant le baroud d’honneur final, toutes guitares et violons sortis.


En définitive, No Cities Left est un grand album aux qualités nombreuses et aux maigres défauts. On pourra certes lui reprocher sa longueur (62 minutes), son romantisme exacerbé, un certain manque de maturité dans la composition avec des envolées lyriques grandiloquentes ou des enchaînements qui peuvent manquer de cohérence (le lien entre les deux parties de "Expect the Worst/Cos she’s a Tourist" par exemple). Mais qu’importe. Reste un album généreux et ambitieux, bâti sur des références solides et bien digérées, qui propose une pop baroque sombre et enivrante dont on ne parvient pas, écoute après écoute à se détourner. Vous auriez bien tort de passer à côté du rock sombre et romantique des Dears !


A écouter : "The Second Part" ; "Pinned Together, Falling Apart" ; "No Cities Left"

Commentaires
FranckAR, le 09/12/2022 à 17:38
Merci Quentin pour cette chronique, car je n'avais jamais entendu parlé de The Dears ! L'album est vraiment très bon et donne envie de se plonger dans le reste de la discographie du groupe.
Jojo79, le 04/12/2022 à 11:28
Excellent album d'un groupe qui manque vraiment d'une plus grande reconnaissance. Je conseille également l'album suivant, "Gang of losers " ,plus cohérent dans son ensemble et leur dernier en date"Lovers Rock" de 2020. La voix du chanteur Murray Lightburn ( personnage touchant dans ses lyrics mais assez barré : le tunrnover de musiciens passés dans le groupe l'atteste ) est juste touchante Merci pour l'excellente Chronique.
MathildeAR, le 04/12/2022 à 10:35
"Lost In The Plot" m' bouleversée à ma majorité ! Belle chronique d'un groupe particulier, dans le bon sens. Ils sont forts ces canadiens !