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Critique d'album

Ten Minute Warning


Ten Minute Warning


(05/05/1998 - SubPop - Proto Grunge - Genre : Rock)
Produit par

1- Swollen Rage / 2- Buried / 3- Face First / 4- Mezz / 5- Disconnected / 6- Erthe / 7- No More Time / 8- Is This The Way? / 9- Pictures
Note de 4.5/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"L'album du grunge avant l'heure, aussi culte qu'inconnu"
Nicolas, le 29/03/2023
( mots)

L’histoire du rock se montre parfois étrange et peut parfois se révéler particulièrement injuste, car il ne reste quasiment rien ou presque de Ten Minute Warning dans la vaste toile de la saga du grunge de Seattle. La faute à un groupe précurseur qui a périclité en moins de deux années, rattrapé par les démons de l’héroïne. À peine le temps de poser son empreinte. Et pourtant…


La genèse du groupe ressemble un peu à un dernier baroud d’honneur avant prise de tangente définitive. Paul Solger, guitariste et leader de la formation, a déjà éreinté deux groupes - Solger et les Fartz - quand son coéquipier Duff McKagan ne cesse d’enchaîner les apparitions dans des projets sans pouvoir décrocher de poste fixe, on l’a vu notamment jouer de la batterie au débotté chez les pop-punkers de The Fastbacks de Kim Warnick et Lulu Gargiulo avant de remplacer Tommy Hansen à la guitare chez les mêmes Fartz que ceux de Solger (vous suivez ?). Las, voilà que les Fartz en question se sabordent en moins de deux mois après une tournée éprouvante sur la côte ouest en compagnie des Dead Kennedys et de D.O.A. Nous étions en présence d’une formation de punk hardcore assez emblématique de l’époque à Seattle, qui, la première depuis les légendaires Heart, a réussi à signer sur un label d’envergure nationale (ici Alternative Tentacles Records) pour proposer son seul et unique album. Donc exit les Fartz : frustrés et écœurés, Solger et McKagan ne comptent pas en rester là, même si leur motivation commence à sérieusement s’écorner. Qu’à cela ne tienne, ils jouent leur va-tout en recrutant Steve Verwolf au chant, David Garrigues à la basse et un certain Greg Gilmore à la batterie - dont c’est le premier vrai poste dans un groupe de rock - tout en se chargeant pour l’un de la guitare lead et l’autre de la guitare rythmique. Le résultat, c’est Ten Minute Warning qui livre en testament un unique disque studio sans titre (signé chez les mêmes Alternative Tentacles Records). Mais allons plus loin.


Car le groupe ne joue plus du tout le même rock que celui des Fartz. Exit (ou quasi) les gueulantes hystériques du hardcore, place à un chant mélodieux, certes éraillé mais apaisé, presque détaché, voire pop par moments. Le son s’est alourdi, le rythme a ralenti, la production se montre léchée et très qualitative. Quand on compare cet enregistrements aux trucs dégueulasses que pondaient les combos de l’époque (il n’y a qu’à écouter les U-Men ou même Malfunkshun pour s’en rendre compte), il y a de quoi rester baba. Surtout on retrouve des riffs et des arrangements que l’on jurerait émaner davantage d’un groupe de metal que de punk hardcore. Vous voyez où je veux en venir ? Ten Minute Warning, sans doute complètement par hasard à l’époque (nous sommes en 1984), vient de réunir tous les éléments du Seattle Sound que Bruce Pavitt choisira de nommer “grunge” trois ans plus tard pour les nouveaux groupes signés sur son label Sub Pop. Pas plus compliqué que ça. Et en dehors de cette franche originalité formelle (historique, s’entend) ? Eh bien l’album tient la route. Les mid-tempos se font écrasants (“Swollen rage”, “Erthe”) et les charges de guitares raclent bien le bitume (“Disconnected”, “Mezz”). Pas de grand génie sur le plan mélodique, même si le chant de Verwolf s’avère très plaisant - on peine à comprendre comment le gus n’a pas fait carrière ensuite. Il va même tutoyer les harangues hardcore sur “No More Time” sur une rythmique ska débridée, quand le conclusif “Is This The Way?” le voit épouser un timbre grave et désenchanté, très dépressif avant l’heure. Le grunge avant la lettre, qu’on vous dit. Après il n’y a rien d’exceptionnel - en particulier la section rythmique ne brille pas particulièrement, mais ce premier effort se montre extrêmement prometteur. Sauf qu’on en restera au stade des promesses…


En effet le groupe implosera après deux ans d’existence et une petite année de tournées des clubs, en ayant à peine eu le temps de laisser son œuvre imprégner le paysage du Washington. La faute à Paul Solger qui replonge dans l’héroïne et qui, pour échapper à son dealer - le fameux Hansen que McKagan a remplacé chez les Fartz - décide de migrer à New York. Fin de l’histoire, définitive. L’album enregistré et prêt à tomber dans les bacs ne sera pas commercialisé. Pour Duff McKagan, la coupe est pleine : il prend ses cliques et ses claques et descend dans sa Ford à Los Angeles avec pour seul bagage une basse. La suite est connue : un an plus tard, il intégrera les Guns N’ Roses. La classe, quand même. Solger ne fera plus rien ou presque, pas plus que Verwolf ou Garrigues. Quant à Gilmore, on le reverra quelques années plus tard derrière les fûts de Mother Love Bone, pour le coup une authentique formation grunge - quoique demeurée relativement confidentielle. Ironie de la chose, c’est Sub Pop qui finira par distribuer l’album de façon posthume en 1998 sur l’insistance de McKagan. Reste donc un disque un peu culte, un peu secret, pas du tout connu, d’une formation anecdotique qui aurait pourtant pu s’avérer décisive en termes d’influence. Aujourd’hui, plus personne ne parle d’eux, en dehors d’un certain Stone Gossard qui avoue avoir eu sa vocation de rock star en se rendant à un concert de Ten Minute Warning. C’est mieux que rien, sans doute.

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Commentaires
Sebastien, le 29/03/2023 à 12:22
Merci pour cette chronique vraiment très intéressante, notamment pour sa remise en perspective historique. Autant je connaissais les pionniers du grunge comme Malfunkshun, Green River ou Skin Yard, autant je n'avais jamais entendu parler de Ten Minute Warning. J'ignorais également le lien entre la scène de Seattle et les Guns via Duff McKagan. Amusant quand on sait que le groupe de Los Angeles était souvent opposé aux ténors du grunge, en particulier Nirvana.