
Steven Wilson
Salle : Amphitéâtre - Salle 3000 (Lyon)
Première partie :
Cela faisait 7 ans que Steven Wilson n’avait plus fait de tournée mondiale sous son nom. Celle de The Future Bites avait été annulée pour cause de COVID. Pour son successeur The Harmony Codex, il avait émis le souhait de tourner dans des salles qui lui permettrait de diffuser le son en audio spatial avec une configuration ou le public serait parmi les musiciens, projet ambitieux qui s’est finalement avéré trop compliqué. The Overview n’étant constitué que de deux morceaux d’une vingtaine de minutes, il avait déjà annoncé qu’il le jouerait en intégralité, accompagné du film qui a spécialement était réalisé pour l’illustrer. Restait à savoir quels titres d’une carrière solo comprenant désormais 8 albums il allait choisir pour compléter le concert. C’est à l’Amphithéâtre 3000 du Centre de Congrès de Lyon que nous sommes allés découvrir cela, en ce mercredi 28 mai.. Une salle que nous ne connaissions pas encore et dont on ne peut que dire du bien : sièges confortables, excellente acoustique et scène bien visible - malgré la capacité de 3000 places - grâce à la disposition en amphithéâtre.
Pour cette tournée, Wilson est accompagné de Craig Blundell à la batterie, Adam Holzmann aux claviers, Nick Beggs à la basse et Randy McStine à la guitare. Sur scène, les musiciens sont disposés de manière assez inhabituelle, comme s’il avait voulu rétablir l’équilibre par rapport aux années précédentes : batterie et claviers (habituellement derrière) sont disposés devant, de profil, aux deux extrémités. Steven Wilson est soit de profil, au centre et derrière quand il est aux claviers, ou de face au centre et devant quand il est à la guitare. McStine et Beggs sont entre les deux, en léger retrait. Lorsque Wilson démarre "Objects outlive us", on est immédiatement happé et pris de frissons. Ce premier titre du nouvel album ne déçoit pas sur scène, il prend même une ampleur supplémentaire. On ne peut pas en dire autant de "The Overview", l’ennui prédominant pendant l’introduction électroniques avec énumération de planètes et galaxies. Quand à sa fin ambient, elle nous aurait complètement endormi s’il n’y avait pas eu cet arrangement convainquant du solo de saxophone pour la guitare par Randy McStine (bien que fidèle, le changement d’instrument le rendait moins kitsch que l’original). Le nouvel album a été joué en intégralité et Wilson annonce un entracte de 20 minutes avant la suite.
Steven revient d’abord seul pour jouer "The Harmony Codex", un morceau stylistiquement assez proche de l’intro de "The Overview". 10 minutes d’arpégiateurs de synthé avec une voix monocorde, de quoi partir pour de bon pour une petite sieste. Même si Holzmann rejoint Wilson en cours de route, il n’y a rien d’autre à voir que des gens qui tournent des boutons sur des synthés qui jouent tout seul. On se raccroche à la vidéo pour tromper l’ennui. Pour ceux qui connaissent la nouvelle éponyme de l’anglais, elle rappellera l’histoire fantastique très réussie qu’il avait écrite. Toujours aux synthés, Steven enchaîne avec "King Ghost", un des titres les plus réussis du décevant The Future Bites. On est d’abord enthousiasmés d’entendre ce titre qui n’avait encore jamais eu droit à une interprétation live. Malheureusement, du fait que ce morceau repose essentiellement sur des textures sonores et des bidouillages en studio, en concert il donne rapidement le sentiment de tourner en rond.
Le groupe dans son intégralité revient enfin pour "Luminol", un choix surprenant, puisque c’est peut-être le tire le plus dispensable d’un album par ailleurs indispensable. Le morceau fleuve de 12 minutes a au moins le mérite de nous réveiller avec son intro et son final rapides et saccadés. Wilson, inhabituellement peu bavard jusque là, prend la parole pour dire au public "enfin, on vous entend ! Parce que sachez que là vous concourrez pour le titre de public le plus silencieux de la tournée, ce qui n’est pas une bonne chose". Fallait pas nous endormir avec 20 minutes de synthé soporifique, a-t-on envie de lui répondre ! Il continue avec son humour habituel "si vous êtes ici par hasard, forcé par votre conjoint ou vos enfants, vous devez être en train de vous demander ce que vous êtes venus voir et pourquoi toutes nos chansons font 20 minutes, eh bien sachez que la prochaine fait moins de 4 minutes, ce qui est d’ailleurs déjà bien trop long selon les standards actuels. Par contre les fans de prog vont me huer !". Avec un telle annonce, on s’attend à "Permanating", la chanson pop joyeuse à la Abba de To the Bone. Mais pour notre plus grand plaisir, c’est en fait "What life Brings" qui sera joué, un des meilleurs titres de The Harmony Codex. Beggs et McStine assurent à la perfection le harmonies vocales souvent nécessaires à la reproduction des compositions de Wilson.
Nouvel prise de parole avant le morceau suivant, Wilson explique pour ceux qui ne le sauraient pas que Porcupine Tree était d’abord un projet solo, et qu’il est donc parfaitement cohérent qu’il pioche aussi dans ce répertoire. C’est "Dislocated Day", issu de l’album The Sky Moves Sideways qui est choisi, un titre pendant lequel le binoclard s’amuse à embêter son batteur en bloquant ses cymbales, avant de s’en prendre de la même manière à son bassiste, déclenchant l’hilarité de Blundell. Le deuxième set se termine par plusieurs morceaux joués très régulièrement en live ("Pariah", "Harmony Korine" et "Vermillioncore"¹ ), mais aussi la première de "Impossible Tightrope", véritable course effrénée de 11 minutes dans un style qui rappelle le Mahavishnu Orchestra. Wilson précise que la plupart du temps il se loupe sur ce morceau très technique, ce qui fait rire son batteur. Si la technicité froide de cette composition peut rebuter sur disque, elle passe beaucoup mieux en live.
Vient l’heure du rappel et Steven nous explique que, n’ayant jamais écrit de tubes dans sa carrière, à ce moment là du concert il peut jouer ce qu’il veut et qu’il a donc choisi deux de ses titres préférés. Ça tombe bien, il s’agit également de deux de nos favorites. "Ancestral" est une composition de 14 minutes issue de Hand.Cannot.Erase dont l’exécution live est à couper le souffle. Elle commence très calmement, mais ne fait que monter en puissance pour atteindre des niveaux de vélocité et d’agressivité complètement fous ! Pour finir sur une note plus calme, c’est l’incontournable "The Raven That Refused to Sing" qui est joué, accompagné de sa magnifique vidéo en animation réalisée par Jess Cope.
Comme quasiment toujours a un concert de Steven Wilson, nous avons eu droit à un son impeccable. Le choix des titres, très éclectique, donne un bon aperçu de tout ce que ce talentueux monsieur sait faire, mais ne permet pas en revanche de tisser un univers cohérent tel qu’il aimait le faire pendant des années en proposant ce qu’il appelle des "voyages musicaux". Avec un à trois morceaux de chaque disque, sa carrière est plutôt bien représentée. On regrette cependant qu’aucun titre de Grace for Drowning, notre album préféré n’ait été retenu. Grâce à un outil comme setlist.fm, il est de nos jours possible de savoir ce qui a été joué sur les autres dates, et on découvre alors que certaines villes ont eu droit à "No Part of Me" et "Remainder the Black Dog". D’ailleurs, seuls 6 titres sont joués systématiquement, 14 autres pouvant changer de soir en soir, ce qui est un sacré beau cadeau pour ceux qui souhaitent se rendre à plusieurs dates de la tournée.
¹ On s’étonne d’ailleurs de la présence aussi fréquente dans les setlists de cet instrumental dispensable que peu de gens doivent connaître s’il ne l’ont pas déjà entendu en concert, puisqu’il ne figure que sur l’EP 4 ½.
La Setlist :
1. Objects Outlive Us
2. The Overview
3. The Harmony Codex
4. King Ghost
5. Luminol
6. What Life Brings
7. Dislocated Day
8. Pariah
9. Impossible Tightrope
10. Harmony Korine
11. Vermillioncore
12. Ancestral
13. The Raven That Refused to Sing