The Bewitched Hands
Vampiric Way
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1- Westminster / 2- Thank You, Goodbye, It's Over / 3- 50's Are Good / 4- Words Can Let You Down / 5- Let Me / 6- Ah! Ah! Ah! Ah! / 7- She Bewitched Me / 8- Boss / 9- Modern Dance / 10- Hard Love / 11- Vampiric Way / 12- The Laws Of Walls
Témoin de la vivacité de la scène rémoise, The Bewitched Hands sort son deuxième album avec une rapidité déconcertante. À l'heure où les groupes semblent laisser passer deux à trois ans entre chaque disque, The Bewitched Hands a lâché Birds & Drums en 2010, Burn & Explode en 2011 (une compilation de faces B et de reprises) et maintenant Vampiric Way en 2012.
On s'aperçoit alors que la sempiternelle formule "toujours difficile 2e album" est réellement vide de sens. Il paraît soudain évident qu'un groupe n'a pas à choisir entre cultiver son pré-carré ou changer radicalement de direction. Il est aussi possible d'amorcer doucement un changement en commençant à explorer de nouvelles pistes sans pour autant sonner le grand chambardement. Peut-être cette dernière option suppose-t-elle des qualités hors normes pour un groupe, dans ce cas on admettra que le deuxième album permet tout simplement de séparer le bon grain de l'ivraie.
À l'évidence les Bewitched Hands sont parfaitement capables de passer ce cap. Birds & Drums avait régulièrement été comparé à une version folk-psychédélique d'Arcade Fire, bien que le groupe s'en défende. Ce n'était pas idiot, notamment parce que The Bewitched Hands chantent à plusieurs et donnent à leur musique des allures de chorale déglinguée. Les Rémois avançaient des influences 90's (Pavement, Nirvana, Pixies) qui transparaissaient peu dans leur musique, en dehors de quelques passages inutilement bruyants ("Cold"), un peu comme quand Kurt Cobain tenait absolument à prouver son intégrité hardcore.
Sur Vampiric Way ces instants pénibles ont disparu et le groupe tente quelques timides excursions vers les années 80. Rien de comparable à "Miss You" ou "Heart Of Glass" mais les synthétiseurs et les rythmes disco font leur apparition ("Words Can Let You Down", "The Laws Of Walls").
Les Bewitched Hands se permettent quelques facilités comme sur "Ah ! Ah ! Ah ! Ah !" mais dans l'ensemble c'est un festival de mélodies absolument stupéfiant. On pourrait citer quasiment tous les titres comme autant de perles pop. "She Bewitched Me" débute comme une chanson folk déséquilibrée sortie de la carrière solo de Syd Barrett pour éclater soudain en une apothéose orgiaque absolue. "Westminster" a le refrain le plus obsessionnel du disque sublimé par les giclures d'orgue, tandis que "Let Me" oscille entre la légèreté de sa rythmique dansante et une tristesse belle à pleurer ("It's clear I'm gonna die/Hopelessly I cry"). "50's Are Good" se lance dans une course frénétique vers la pure joie, la guitare déraille complètement sous l'effet d'un enthousiasme juvénile pour déboucher sur un instant de recueillement ("Words Can Let You Down"). D'explosions de joie ("Vampiric Way" tube sautillant) en instants de mélancolie fatiguée ("Modern Dance"), jusqu'à la conclusion en forme d'hymne majestueux ("The Laws Of Walls") tout est féerique.
Plus qu'Arcade Fire, The Bewitched Hands se rapproche en bien des aspects de My Morning Jacket. Chez Arcade Fire les instruments pris séparément sont maladroits et boiteux mais le tout sublime la somme des parties. À l'inverse les chansons des The Bewitched Hands tiennent parfaitement sur leur base folk-pop et les développements de l'orchestration viennent leur apporter une grandeur resplendissante. La production s'adapte aux spécificités de chaque morceau avec un son compressé ou aéré, saturé ou plein d'écho selon l'ambiance voulue, tout en assurant au disque une cohérence qui faisait défaut à Birds & Drums. Reste donc à admirer et à se réjouir de vivre à notre époque. Pour qui a un minimum de curiosité, des merveilles apparaissent chaque mois et Vampiric Way en fait partie.