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Critique d'album

Steven Wilson


The Harmony Codex


(29/09/2023 - Virgin, Spinefarm - Rock progressif - Genre : Rock)
Produit par Steven Wilson

1- Inclination / 2- What Life Brings / 3- Economies Of Scale / 4- Impossible Tightrope / 5- Rock Bottom / 6- Beautiful Scarecrow / 7- The Harmony Codex / 8- Time is Running Out / 9- Actual Brutal Facts / 10- Staircase
Note de 4/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"Un Steven Wilson mineur n'en demeure pas moins un très bon disque"
Nicolas, le 11/12/2023
( mots)

Sentiment nouveau : c’est bien avec crainte, et pas forcément avec beaucoup d’impatience, que nous attendions ce nouvel émolument de Steven Wilson. La faute au réel premier faux-pas qui a changé la donne pour beaucoup de monde, la faute à ce Future Bites bien imparfait, bien peu goûtu, bien trop racoleur pour respirer le vrai, l’authentique, le sincère. Oh certes il y avait déjà au avant quelques polémiques autour du prodige d’Hemel Hempstead, on se rappellera de l’époque de To The Bones quand des fans prenaient l’avion pour aller dire en personne à Wilson à quel point son nouveau disque puait. Mais il s’agissait là d’une critique de forme uniquement (la pop ABBAesque de “Permanating”, aussi truculente soit-elle, aura décidément causé bien des ravages) quand le fond de la musique, sa chair, son âme, ne souffraient encore d’aucune réserve. The Future Bites a malheureusement pris Steven Wilson en défaut là où il excelle d’habitude : l’écriture musicale, la qualité de composition - et dans une moindre mesure d’arrangements, et c’est bien plus grave qu’une soi-disant faute de goût cosmétique. Autant dire que l’on espérait réellement que The Harmony Codex allait redresser la barre. Mission accomplie, bien que quelques réserves soient de mise.

Mission accomplie, car fondamentalement, nous voici revenus au Steven Wilson d’avant, avec une qualité de songwriting revue à la hausse, un tropisme progressif moderne au blason redoré, un retour à des morceaux plus riches, plus denses, moins immédiats mais non moins sensibles. Pas vraiment écorné par la critique pro (The Future Bites a récolté un très correct 74 sur 100 au baromètre Metacritic : il y a pire, comme désaveu), Steven Wilson a visiblement entendu les réserves de son premier public, celui qui l’accompagne depuis ses débuts, depuis Porcupine Tree, Blackfield, No-Man and so on, celui qui s’est retrouvé déçu par son dernier album, et il a souhaité renouer avec des fondamentaux, des balises aussi rassurantes que certifiées solides : la priorité donnée aux fond des chansons par rapport à leur forme, la prédominance de la guitare dans l’accompagnement et la sculpture instrumentale, mais aussi le retour à une certaine épure et, disons, une certaine anti-séduction. SW voulait toucher les masses et il a tout fait pour, au point, avec The Future Bites, de se perdre en chemin, de renoncer à une part de sa sensibilité certes trop complexe à appréhender pour le public lambda mais ô combien inhérente à sa personne. Avec The Harmony Codex, on retrouve enfin ce musicien génial que l’on connaissait, ses tics mélodiques parfois sibyllins, sa profondeur pop qui s’exprime parfois au détriment de son immédiateté, sa grande maîtrise de tous les aspects d’une chanson, et l’on navigue ici en terrain connu, quoique pas forcément vu et revu. On a donc affaire à du neuf fait avec du vieux pour un résultat rassérénant, satisfaisant et même très agréable, mais pas forcément très enthousiasmant.

Premier écueil, l’inhomogénéité du disque. L’artifice promo voulant que nous ayons affaire à “une boîte de puzzle musicale” tient assez peu la route et ne convainc pas en première écoute, et il en faut plusieurs pour finir par adhérer à cet assemblage assez disparate de titres dissemblables tant dans leur fond que dans leur mise en boîte. Que trouver de commun entre un “Inclination” à l'électronique sombre et suffocante hérité d’un IEM vénéneux et un “What Life Brings” semi-acoustique que l’on jurerait sorti des sessions d’enregistrement de Lightbulb Sun (Porcupine Tree) ? C’est là que l’on touche à une certaine limite quand on est capable, grosso modo, de se frotter à tous les genres musicaux modernes, du rock à la pop, de l’ambient au metal, de l’indu à l’électro, etc : on ne peut pas, il ne faut pas, tout mélanger. Ici le lien ne se réalise qu’in extremis, justement parce que Wilson a l’intelligence de ne pas aller trop loin dans chaque prise de position. Ce kaléidoscope, aussi bigarré qu’il paraisse en première instance, est beaucoup plus réfléchi qu’il n’en a l’air, faute de quoi même le plus persévérant des auditeurs se serait retrouvé perdu en chemin. Ce n’est pas le cas ici. Le disque déroule aisément sa tracklist, chaque morceau trouve sa place dans un tout et même dans une progression, chaque étape marquant une petite avancée dans l’émotion dans la première moitié du disque. Une première moitié qui ne souffre dès lors (passé ce parti-pris assumé d'éclectisme) d’aucune forme de critique. “Inclination”, par son gimmick rythmique martelé en boucle (il me semble que c’est la première fois que Wilson bâtit l’un de ses morceaux sur un rythme), apporte son lot de lancinance et d’aliénation. “What Life Brings” retrouve l’épure, l’irradiation, la chaleur mélancolique du grand Wilson d’antan, telle une madeleine de Proust aussi riche que savoureuse mais sans pour autant qu’il n’y ait de sentiment de redite (à signaler un splendide solo de guitare à rallonge, wilsonnien - ou gilmourien, c’est selon - en diable). “Economies of Scale” subjugue par l’attrait froid de son électronica contemplative, avec une palette d’arrangements aussi simple que subjuguante, et une conclusion en canon d’une sidérante beauté. Brillant de mille feux, “Rock Bottom”, magnifique ode à la vie et à l’espoir (“Don’t lose hope / Stay alive” constituant le mantra du titre) donne à Ninet Tayeb l’occasion de nous entraîner dans de nouveaux trésors d’émotion, avec une palette vocale encore une fois stupéfiante, au premier rang duquel son grain chaudement éraillé ne représente que la partie émergée de l’iceberg. “Beautiful Scarecrow” (joli oxymore), quant à lui, nous replonge dans le marasme et la tristesse glacée de son implacable synthétisme, grouillant et poisseux dans son pont suffocant. Notez que jusqu’ici, tout va bien.

Et puis vient le morceau titre, et là on ne comprend pas. En plein milieu du disque, “The Harmony Codex” retombe dans le travers le plus préjudiciable de The Future Bites : son manque de matière. Pourquoi étirer sur dix minutes un trip spatial béat qui aurait pu faire office de sympathique petite transition, voire de fil rouge rappelé parcimonieusement, çà et là, au fil de l’album ? On note d’ailleurs un bis succinct en fin de “Staircase”, et clairement la piste aurait méritée d’être creusée. En l’état, ces interminables arabesques de synthétiseur ne parviennent pas à nous faire réprimer un certain nombre de bâillements inopportuns, pas vraiment aidés il est vrai par un discours féminin détaché assez peu porteur. Un voyage dans l'espace (ou l’espace-temps - on ne sait pas trop) qui gâche réellement le disque, autant le reconnaître. D’autant que la fin de l’album fonctionne, que ce soit le malin “Time Is Runing Out” avec sa construction mélodique piano-voix en chausse-trappes, le crépusculaire “Actual Brutal Facts” aux spoken words lapidaires qui rentrent bien dans le dark mood de Wilson, ou le roboratif “Staircase”, sorte de synthèse pop des allants les plus variés de son auteur, mention spéciale aux longs soli instrumentaux d’une confondante pertinence (guitare puis basse - bon sang, quel musicien !), ça marche et ça marche bien.

En définitive, The Harmony Codex remplit son office quand il s’agit de rassurer et de renouer avec les fondamentaux de Steven Wilson, mais son caractère éclaté - voulu comme tel ? Chacun est libre de le croire ou non - ne lui permet pas de magnifier sa matière au point de l’élever au niveau, au hasard, d’un Hand.Cannot.Erase, quand son inconstance - cf sa dispensable pièce centrale - ne lui donne pas les moyens d’égaler la performance d’un To The Bones. Plus complexe que ses deux précédents disques, il ne se montre néanmoins pas aussi profond et immersif que Grace For Drowning, et bien sûr à mille lieues du chef d’œuvre de progressisme qu’est The Raven That Refused To Sing. Bref, un très bon disque, vraiment, auquel il faut réellement laisser sa chance, mais paradoxalement un Steven Wilson mineur. Dont acte, et à charge de revanche.

Commentaires
MathildeAr, le 13/12/2023 à 11:38
Economy of scale qui donne envie d'écouter l'entièreté ! Belle reprise avec les Manic Street Preachers
FranckAR, le 28/10/2023 à 12:22
Plutôt emballé par ce nouveau cru (effectivement bien plus recommandable que son prédécesseur). L'album évoque plusieurs projets parallèles de Wilson, avec une musique que je vois située quelque part entre Thom York (The Eraser) et Massive Attack (Heligoland). Comme toi Nicolas, je n'ai pas compris le délire du morceau "The Harmony Codex" qui est d'un ennui mortel, et qui n'apporte pas grand chose hormis l'envie de changer d'album... Un album qui mérite qu'on lui laisse le temps malgré ses petites fautes de goût.