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Critique d'album

Matt Elliott


The End Of Days


(31/03/2023 - Ici d'ailleurs - Dark Folk - Genre : Chanson / Folk)
Produit par Matt Elliott, David Chalmin

1- The End of Days / 2- January's Song / 3- Song of Consolation / 4- Healing A Wound Will Often Begin With a Bruise / 5- Flowers for Bea / 6- Unresolved
Note de 4/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"Un exercice dévorant de folk sombre et hantée"
Valentin, le 13/04/2023
( mots)

The End Of Days se présente à nous dans la douce lumière d’une journée ordinaire. Les premiers mots de Matt Elliott nous invitent calmement à le suivre dans une marche ultime vers l’au delà, et on se surprend à vouloir l’accompagner malgré nous. A vrai dire, la musique du désormais Lorrain n’a rarement été aussi charmante que sur les premiers instants de ce titre éponyme. On reconnaît le jeu de guitare fingerstyle inspiré de la culture andalouse, mais cette fois-ci au service d’une mélodie tranquille et innocente, bercée par le timbre de voix profondément grave de Matt Elliott. C’est seulement lorsque la suite d’accords dévie de sa progression naturelle que les premiers nuages couleur gris cendre apparaissent et que la promenade inquiète. On plonge alors un peu plus dans la torpeur à mesure que l’on écoute notre camarade consumer son pessimisme sur tous les aspects de sa musique. Les mots perdent soudainement leur retenue, le flot de cordes pincées se dilate douloureusement, même le piano feutré qui ne pouvait apporter que réconfort à première vue devient un combustible parmi tant d’autres, et c’est finalement dans un brasier de cordes et de cuivres que tout est emporté. Lorsque l’on distingue enfin les saxophones se gausser de notre sort au milieu de ce chaos de flammes, on réalise que l’on a définitivement retrouvé Matt Elliott, en maître de cet orchestre funèbre.


The End Of Days, comme nom d’album, préfigurait une errance routinière pour Matt Elliott. Non pas que le musicien ait l’habitude de ponctuer sa musique de figures dantesques, mais plutôt qu’un fort sentiment de fatalité a toujours imprégné ses créations d’un air grave et désabusé. Drinking Songs nous enfermait dans un vieux pub vide, à une heure où plus rien ni personne ne pouvait consoler nos peines. Howling Songs nous confrontait avec la même sévérité à l’épreuve du deuil et de la mort. Plus explicitement, son album précédent s’appelait déjà Farewell To All We Know avec des paroles très équivoques ("From this day on / Until the end of time / I'm going to leave all my grief and woes behind / I'll drift and I'll go / Where the wind blows / Where life carries me"). En vingt ans de carrière et neuf albums, son univers musical s’est peu à peu détaché de son caractère expérimental ou avant-folk pour se stabiliser sur une essence qui lui est propre, celle d’une folk sombre et réfléchie aux influences européennes variées (principalement balkaniques) et aux développements étendus. Une identité qui permet, encore aujourd’hui, de promettre une immersion rapide dans un univers dense et délicat : il s’agira ici de paysages de province brûlant lentement dans l’indifférence du monde, tel un accompagnement sonore à la marche infinie du livre The Road de Cormac McCarthy.


The End Of Days est donc hanté d’amertume de la même manière que ses prédécesseurs, sans pour autant être aussi impitoyable. Les morceaux se construisent et s’assemblent autour de longues mélodies acoustiques à l’accompagnement vocal discret ou rare, comme s’il fallait éviter de les déranger dans leurs déambulations audacieuses. Le titre éponyme constitue alors un modèle du genre tant le chemin proposé justifie autant une contemplation naïve qu’une régression cynique, sans jamais forcer la transition entre l’un et l’autre. Passé ce point cependant, la candeur se fait beaucoup plus rare. "January Song" laisse témoigner une chorale de fantômes trépassés par le froid hivernal ("And the nights and the seasons continue / Long after we’re gone / The world keeps on turning / The world continues on / And the nights and seasons continue / Long after we're gone") et les différentes pistes de saxophone s’attirent et s’évitent comme des solitudes juxtaposées. "Consolation song" est un épitaphe pour souhaits enterrés, déguisée en une parodie d’encouragements, et quand on retire définitivement la rêverie de la mélancolie, il ne reste plus que la tragédie de "Flowers For Bae" avec ses cordes foudroyantes et son intensité aliénante. Le timbre de voix et l’attitude du chanteur invoquent naturellement un Leonard Cohen vieillissant, mais avec un peu d’imagination, on peut également se représenter un alter-ego macabre de Joanna Newsom, comme échappé du monde à l’envers.


Le vrai regret de cet album est à chercher du côté de l’instrumental "Healing A Wound Will Often Begin With A Bruise", agréable à la première écoute mais un peu trop long et léger pour être aussi captivant que le reste. Peut-être aussi que l’évolution stylistique n’est pas assez flagrante depuis Farewell to All We Know ou que le chant ne devrait pas s’infliger autant de pudeur, mais cela n’empêchera pas les compositions de cet album de vous envelopper de leur morosité – parce que The End of Days ne se contentera pas seulement d’accompagner les matinées pluvieuses et les promenades maussades : il habitera également les crépuscules manqués et les rêves abandonnés.


Morceaux conseillés : "The End of Days", "January Song", "Flowers for Bae"

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