Bruce Springsteen
Salle : Festival des Vieilles Charrues (Carhaix)
Première partie :
21h43 : "Bonjour, Carhaixe (sic), est-ce que vous allez bien ?" c'est avec ces mots lus en Breton que le Boss a commencé par enflammer les 45 000 spectateurs présents. Sans plus attendre, son premier "one, two, three, four !" a appelé les premières notes de "Badlands". En ces terres où les vieilles charrues en ont remué plus d'un, le concert d'une légende du rock vient de commencer avec 13 petites minutes de retard. Une bagatelle puisque les plus avertis savent qu'ils vont vibrer pendant deux heures et demie.
Avec lui et la chanson "No Surrender" qui suit, le public entier est déjà en passe de communier. Un état qui atteint rapidement son apogée avec "Outlaw Pete", extraite du dernier album. Son air western colle à la région, le Boss se coiffe d'un chapeau de cowboy pour l'occasion et le refrain "I'm outlaw Pete, can your hear me" met la prairie de Kerampuil à l'unisson. Bruce vit chacune de ses chansons. Mais avant d'aller plus loin, une autre évidence s'impose. Si j'ai toujours aimé le bonhomme et ce qu'il écrit, musicalement je n'ai jamais été un fan de base et c'est donc une première pour moi. Et je suis rapidement ébahi et ravi par son sourire et sa joie de jouer. En fait, malgré tous les concerts auxquels j'ai eu le plaisir d'assister, je n'ai jamais ressenti une telle impression. Lui et son E-Street Band sont véritablement là pour vous procurer du bonheur.
Cela fait déjà une demi heure que le Boss est sous les projecteurs et c'est avec "Working on a Dream" que ses premiers mots en Français sont prononcés. Il nous dit sa joie d'être ici et son appel à rêver. Son va-et-vient sur l'avant-scène pour contenter les premiers rangs est alors comblé par l'inévitable passage des chansons récoltées grâce aux cartons brandis par ses plus grands fans. Après les avoir montrés à toute sa bande, c'est "Tenth Avenue Freeze Out" et "I'm Going Down" qui sont jouées. Au pic de sa forme et de son euphorie du moment, il va même jusqu'à se jeter dans les bras de Steve Van Zandt, ce dernier ayant toujours sa guitare dans les mains... "Because the Night" et "The River" font également leur effet avant que le Boss ne se rapproche encore plus de nous. Et de deux jeunes filles en particulier. Sur "Sunny Day" c'est avec tendresse qu'il tend son micro à une gamine de 5 ou 6 ans qui, à la vue de tous, reste adorablement bouche bée sur les deux écrans géants. En revanche, une autre jeune fille est aux anges lorsque les premières notes de "Dancing in the Dark" résonnent. Elle a raison, ses instants inoubliables sont sur le point d'arriver. Cette jolie brune de 16 ans est facilement repérée par Bruce grâce à sa pancarte où il est inscrit "French Courtney Cox" (en référence à l'actrice qui dansait à l'époque dans le clip de la chanson). Invitée à le rejoindre sur scène, elle a droit à deux pas de danse et une bise avant qu'il ne la porte dans ses bras pour qu'elle regagne le public. Même en nage le Boss sait se montrer galant.
Les morceaux sont enchaînés sans une seule seconde de temps mort alors que l'on vient de passer les deux heures de concert. Là aussi c'est la première fois que j'assiste à une telle performance physique et musicale ! Bruce Springsteen aura tout de même 60 ans en septembre ! Le batteur Max Weinberg est également impressionnant de vitalité et Nils Lofgren un guitariste d'une incroyable dextérité. Certes, le Boss commence tout de même à fatiguer et sa voix n'est plus complètement assurée mais le final approche et il continue à nous sourire. Nous n'aurons pas l'avantage d'écouter "Born in the USA", "Streets of Philadelphia" ou "The Wrestler", cette nuit est volontairement placée sous le signe de l'allégresse.
Pour preuve finale, le temps est venu pour tous ses musiciens de jouer et de chanter en choeur à ses côtés. Son fils aîné est même de la partie, entamée avec la traditionnelle folk song irlandaise "American Land". Puis c'est autour des Beatles d'être célébrés avec un "Twist and Shout" endiablé, ingénieusement entremêlé avec le refrain de "La Bamba" ! Une dernière et totale communion qui va durer plus d'un quart d'heure. Après nous avoir transporté dans son monde et après s'être dépensé comme personne, le Boss peut lancer un vibrant "kenavo" de circonstance. Il est 0h13, il vient de jouer pendant 2h30 très exactement. Sur le flanc d'une prairie, en plein coeur de la Bretagne, le sourire est sur les lèvres de 45 000 personnes et le sien est déjà gravé dans ma mémoire. A l'immense plaisir de vous avoir rencontré un soir d'été Monsieur Springsteen.