The Stranglers
Aural Sculpture
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1- Ice Queen / 2- Skin Deep / 3- Let Me Down Easy / 4- No Mercy / 5- North Winds / 6- Uptown / 7- Punch & Judy / 8- Spain / 9- Laughing / 10- Souls / 11- Mad Hatter / 12- In One Door / 13- Hot Club / 14- Achilles Heel / 15- Place De Victoires / 16- Vladimir Goes To Havana / 17- The Aural Sculpture Manifesto
À quoi joue Jean-Jacques Burnel ? Le voici en compagnie de Dave Greenfield pour enregistrer un album solo, Fire & Water (1983), destiné à la bande-son du film de Vincent Coudanne Écoutez vos murs ; le voilà avec Espen Beranek Holm (Trigger, 1984), figure de la pop norvégienne, et qui s’acoquine avec les Japonais d’ARB (Yellow Blood, 1984). Le bassiste francophone se tient donc en retrait lors de l’enregistrement d’Aural Sculpture aux "studios du plats pays" (ICP à Bruxelles), un album qui s’éloigne volontairement des nappes sensuelles et de la guitare acoustique hispanisante de Feline, sorti l’année précédente.
On retrouve certes des nappes et des mélodies mielleuses sur "Ice Queen", aux sonorités et aux rythmes très (et même trop) 80’s, mais les Stranglers ont la drôle d’idée d’ajouter une section cuivrée, très (et même trop) présente lors du final. On lui préférera la langueur de "Skin Deep", qui se place à la fois dans la lignée d’un "Midnight Summer Dream" en un peu plus énergique, et pas loin d’"Always the Sun", ce qui en fait un titre de transition. La new-wave n’est pas abandonnée ("Norh Winds (Blowing)", qui n’est pas inintéressant), mais le groupe décide de suivre la direction de plus en plus en FM de la nouvelle vague.
Or, de la part des signataires de l’intransigeant "Manifeste de la sculpture auditive", on s’étonnera d’une telle soumission à l’air du temps qui pose quelques questions. La joyeuseté de "No Mercy", permise par l’alliance presque cartoonesque entre les lignes de guitare, les chœurs et les cuivres, n’est-elle pas un peu gauche malgré ses aspérités stranglers-iennes (au chant et aux synthés) ? Le groupe ne pêche-t-il pas par excès de mièvrerie sur "Let Me Down Easy" ? N’y-a-t-il pas un soupçon de Billy Joel sur l’hommage à Marvin Gaye qu’est "Laughing" ou de Tears for Fear sur "Souls" ?
Il y aussi les faux départs et les faux espoirs. Alors qu’"Uptown" fait intelligemment clin d’œil à Eddie Cochran et que "Punch and Judy" fleure bon les 50’s, les deux titres sont gâchés par des cuivres désuets quand de son côté, "Spain" s’inspire désespérément du groove rock’n’roll sans l’âme ni les instruments. On n’évoquera à peine "Mad Hatter" comme l’enfant maudit des Beach Boys et de Madness.
Aural Sculpture est un album divise les fans, entre une détestation immédiate à l’époque et une lente réhabilitation dans la postérité : vous aurez compris dans quel camp je me range, et loin de moi l’idée de jouer au puriste, il m’est impossible de sauver l’anecdotique et le carrément mauvais (goût, concernant les cuivres, certaines parties aux synthés et surtout l’écriture mélodique) qui dominent cet opus.
À écouter : "Skin Deep", "Norh Winds (Blowing)"