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Critique d'album

The Arcs


Electrophonic Chronic


(27/01/2023 - Easy Eye Sound & Concord - Garage Blues presque du Black - Genre : Pop Rock)
Produit par Dan Auerbach et Leon Michels

1- Keep on Dreamin' / 2- Eyez / 3- Heaven Is a Place / 4- Califone Interlude / 5- River / 6- Sunshine / 7- A Man Will Do Wrong / 8- Behind the Eyes / 9- Backstage Mess / 10- Sporting Girls Interlude / 11- Love Doesn't Live Here Anymore / 12- Only One for Me
Note de 4/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"Le premier coup de coeur de 2023, entre rock psychédélique et soul suave"
Maxime L, le 06/02/2023
( mots)

Et si les Black Keys étaient devenus, un peu par la force des choses (et par la faiblesse des dernières sorties), le projet le moins intéressant de Dan Auerbach ?


Entre son rôle de producteur du dernier excellent album des Hermanos Gutierrez et ce Electrophonic Chronic, deuxième disque de The Arcs, on est résolument en droit de se poser la question. Ceci étant, réduire The Arcs comme la formation du seul Dan Auerbach serait un raccourci aussi dangereux qu’erroné puisque il y est entouré, depuis 2015, par la crème de la scène “néo soul psychédélique instrumentale”, conférant à The Arcs une sorte d’aura d’“all star band” moderne et à la croisée des chemins, entre rock ardent et soul chaleureuse. Il y a d’abord Leon Michels, seconde tête pensante du combo, producteur, multi-instrumentiste et ayant œuvré avec de grands noms de la musique Soul, et même un peu au-delà : de Sharon Jones & The Dap-Kings à Charles Bradley ou les géniaux Menahan Street Band, en passant par des collaborations avec le Wu-Tang Clan. Quant à son CV de producteur, on compte des travaux pour Norah Jones, Lee Fields ou Hanni El-Khatib. Rien que ça. Le pedigree des autres musiciens n’est pas en reste : le bassiste Nick Movshon a joué tout autant pour Menahan Street Band ou pour… Bruno Mars. Quant à Homer Steinwess, il est un batteur de session réputé et prisé et a joué, entre autres, sur Back to Black d’Amy Winehouse, excusez du peu.


Yours Dreamily, le premier effort de The Arcs, remonte à 2015, une époque où les Black Keys avaient déjà largement entamé leur descente d’inspiration, et ce rock soul psychédélique teinté de cuivres mariachi avait été une vraie belle surprise, très rafraichissante, sans pour autant déchainer les passions dans le petit monde du rock, en dehors bien sûr des fidèles suiveurs du duo d’Akron. Les revoilà 8 ans plus tard, une absence très longue, (à plus forte raison à notre époque), et expliquée autant par les multiples projets d’Auerbach que par le décès soudain de Richard Swift, un des membres du line-up original (entrevu aussi chez The Shins, et à l’image de Leon Michels, musicien live pour les Black Keys) en 2018. Electrophonic Chronic doit d’ailleurs être considéré comme un album avec les membres originels du groupe, tous les morceaux ayant été enregistrés avant la disparition de Swift.


 "Ce nouveau disque consiste à honorer Swift. C'est une façon pour nous de lui dire au revoir, en jouant, en riant, en chantant. C'était parfois lourd, mais je pense que c'était vraiment utile de le faire."*


Electrophonic Chronic reprend là où Yours Dreamily s’était arrêté, avec le bien nommé “Keep On Dreamin”, où l’on retrouve ces mêmes claviers colorés, l’usage de la voix en falsetto, mais surtout l’utilisation de cuivres espiègles, qui constituaient une des marques de fabrique du premier opus. Mais sur ce plan là, ce titre inaugural est presque un trompe l’œil quant à la suite, les cuivres s’effaçant progressivement pour laisser davantage de place au clavier et à l’orgue, et donnant à l’ensemble une couleur soul psychédélique bien plus prononcée.


En dehors de la voix très identifiable d’Auerbach (et encore, il n’a pas la mauvaise idée ici de doubler toutes ses voix comme sur 95% de Dropout Boogie), il n’y a en réalité pas tant de choses en commun entre la musique de The Arcs et celle des Black Keys. Peut-être la recherche du gimmick à tout prix, quête devenue facile mais un peu vaine pour le duo d’Akron, mais qui fait mouche ici, tout au long des 40 minutes de l’album. On retiendra presque dès la première écoute les sons de guitares épais sur certains solo, sur “Keep On Dreamin’” ou “Heaven is a Place”, ou bien sûr, l’intégralité de l’extraordinaire “Eyez”, impeccable titre mid-tempo au groove glissant et aux touches de claviers cosmiques impeccablement dosées.


Et quand de prime abord les ficelles paraissent un peu grosses, on pense à l’introduction pataude de “Heaven Is A Place” qui flirte dangereusement avec la faute de goût (et sa mélodie évoquant le Weezer un peu en roue libre), on est heureusement rattrapé par le sens de la composition des musiciens (et des refrains), et par la chaleur qui se dégage de l’ensemble. Le constat est identique pour “Sunshine” où l’aspect potentiellement irritant des chœurs très haut-perchés et triturés est vite gommé par l’efficacité d’un refrain, la rondeur d’une ligne de guitare ou le groove global, incarné par un groupe, qui maîtrise son sujet et qui parvient à un équilibre idéal entre psychédélisme contenu, Soul délicatement rétro, et ambiances lascives du meilleur effet.


On peut toujours être dubitatifs quant à l’utilisation d’interludes (trois ici) qui n’apportent jamais grand chose, mais qui dans le cas présent, ne nuisent absolument pas à la cohérence globale. Si la seconde moitié du disque est légèrement plus convenue, elle n’en reste pas moins intéressante avec sont lot de petites trouvailles, “Behind The Eyes” en tête, la voix très modulée et à peine reconnaissable d’Auerbach, posée sur une grille blues tout ce qu’il y a de plus traditionnel, ou sur la lente ballade “Only One For Me”, à la langueur extatique et qui clôt un très bon album de la meilleure manière possible, et qui lance, espérons le, une année 2023 riche en sorties de cet acabit.


 


À écouter : "Eyez", "Keep On Dreamin'", "Only One For Me"


*Selon une interview de Dan Auerbach à Pitchfork.

Commentaires
DiegoAR, le 09/02/2023 à 16:27
Merci de mettre en avant ce projet, sur lequel Auerbach semble inspiré ! Et puis surtout merci pour l'hommage à Richard Swift, dont l'influence sur beaucoup d'artistes est méconnue en France. Les premières lignes du dernier album de Fleet Foxes sont "for Richard Swift", les projets avec Damien Jurado sont tops aussi !