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Critique d'album

Remo Drive


Greatest Hits


(16/03/2017 - Indépendant - Dance Punk - Genre : Ska / Punk)
Produit par Erik Paulson

1- Art School / 2- Hunting For Sport / 3- Crash Test Rating / 4- Strawberita / 5- Eat Shit / 6- Trying 2 Fool U / 7- Yer Killin' Me / 8- I'm My Own Doctor / 9- Name Brand
Note de 3/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"Make Emo Great Again!"
Valentin, le 30/05/2017
( mots)

Remo Drive fait partie de ces rares groupes qui, encore aujourd’hui, se revendiquent clairement du mouvement emo. Comme s’ils ne craignaient pas la réputation funeste accompagnant le terme. Comme s’ils n’avaient pas peur d’être assimilés aux ignominies de My Chemical Romance, Dashboard Confessional ou Fall Out Boys, dont il est devenu difficile de trouver du monde pour les défendre avec passion ces jours-ci. La preuve, c'est qu'il y a sûrement quelques lecteurs déjà en train de convulser sur le sol rien qu'à l’idée de devoir écouter un disque d’emo en 2017. Reprenez vos esprits, rassurez-vous : la relation entre les trois groupes précédemment cités et la musique de Remo Drive est de même nature que celle qui lie notre nouveau président avec la gauche, la vraie. C’est-à-dire floue et superficielle. Il se trouve en effet qu’à partir des années 2000, les médias spécialisés ou non ont entretenu une certaine confusion quant à la réelle signification derrière ce petit mot, en peignant surtout l’idée d’une esthétique du mal-être adolescent extrêmement stéréotypée où les mèches colorées y seraient reines. Avec une définition aussi large, on a donc naturellement vu tout et n’importe quoi se retrouver dans ce gloubi-boulga des ténèbres, du rnb de Jena Lee à la pop molle de Kyo en passant par la coiffure peroxydée du leader de Tokio Hotel.


Un destin mainstream manifestement dramatique donc, mais aussi à l’exact opposé des origines souterraines de l’emo : au milieu des années 80, on identifiait en effet ce sous-genre comme un dérivé du post-hardcore faisant la part belle aux ressentis intimes des paroliers. Le rayonnement de cette scène se trouvait pourtant limité à quelques rares formations ouvertement punk telles que Rites of Spring ou Jawbreaker (qui vient d’ailleurs de se reformer) et il faudra alors attendre les années 90 pour que l’emo atteigne une forme plus sensible et plus ouverte, qui lui permettra de s’envoler créativement ainsi que de jouir d’une forte reconnaissance auprès d’un jeune public plutôt underground. Et là encore, rien à voir avec la musique ou les looks de Gerard Way and co, dont le style se rapproche davantage d’une sorte de sous pop-punk fourre-tout souvent renommée emo-pop que d’emo à proprement parler. Non, derrière l’emo des années 90, il y a surtout la recherche d’un équilibre entre violence émotive, confession et contemplation qui se retrouve encore aujourd’hui assez rarement ailleurs, d’où l’intérêt du revival discret qui prend forme depuis quelques années.


Réhabiliter l’emo auprès d’un nouveau public, voilà donc sans doute l’objectif de cette jeune formation américaine tel qu’on peut le lire dans leur premier single, “Yer Killin' Me”. Pas besoin de chercher très loin pour comprendre en quoi ce titre a permis à lui seul de sortir le groupe de l’inconnu : un son brut, une base rythmique puissante, un chant énergique et passionné mais surtout un texte ironiquement immature, jonché d’hyperboles auto-destructives très amusantes. Erik "Emo Dave" Paulson y dépeint le portrait d’une personne si peu supportable qu’il préférerait littéralement s’offrir une agonie longue et douloureuse en fumant tout et n’importe quoi plutôt que de l’écouter se plaindre une fois de plus (“You make me want to start smoking cigarettes so I die slowly / Everything that’s bad for me, yer killin' me”). En plus de cela, “Yer Killin' Me” suit une structure en trois parties qui complète assez intelligemment le propos. La première constitue le cœur du morceau, la confrontation entre le parolier et cet individu toxique, l’instant de grâce où la rancœur accumulée pendant des mois explose enfin au grand jour. S’en suit la rupture (rythmique) avec un instrumental tonique et libérateur qui concrétise le sentiment de délivrance propre à cette désunion. Puis le tempo s’apaise, les guitares s'assagissent et c’est finalement avec une petite improvisation acoustique que le morceau se conclut, dans le plus grand des calmes. Pour résumer, on n’avait pas vu un titre estampillé “emo” aussi bien pensé et exécuté depuis des années, et il y a donc largement de quoi être curieux quant au reste du disque.


Ce Greatest Hits (il s'agit bien de leur premier album, au passage) développe cependant un ton assez différent de “Yer Killin' Me”, la confession ou l'introspection prenant alors le pas sur le sarcasme et l’auto-dérision, sans les oublier néanmoins. Il s’agit donc essentiellement de la vie de jeune adulte suburbain d'Erik, qui réussit à construire des textes modestes mais intelligents, là où les artistes emo sont souvent critiqué pour le caractère outrancièrement “journal intime” de leurs morceaux. “Eat Shit” se moque alors des chutes en skate incessantes de son chanteur qui deviennent gênantes à son âge, et on se sentirai presque tomber de la planche lors que les guitares se mettent à trembler après cette première moitié enflammée. “Hunting for Sport” et “Strawberrita”, bien moins explosives mais toujours aussi passionnées, discutent de cette impression d’être constamment écrasé par l’autre dans une relation. Quant à “Summertime”, la piste la plus mélancolique de l’album, il s’agit de contraster la sérénité estivale avec le futur déplorable qui s’annonce pour ces vingtenaires. Le titre repose sur une dynamique classique, couplets doux et refrain puissant, mais le tout est assez bien exploité pour qu’on se laisse emporter par les complaintes amères d'Erik.


C’est d’ailleurs le principal problème de ce disque : il n’invente rien. Si on met les textes de côté deux minutes, Greatest Hits aurait sans problème pu voir le jour au siècle précédent. On pense donc un peu trop aux fers de lance de l’emo 90’s tels que The Get Up Kids ou Sunny Day Real Estate à mesure que l’on progresse dans l’écoute, mais aussi au Pinkerton de Weezer, un album très important pour l’emo bien que ne faisant pas vraiment parti du mouvement rétrospectivement. Autre chose : l’album a été enregistré furtivement dans le salon de la mère d'Erik Paulson … ce qui n’est pas du tout un problème en soi (c'est peut-être même un très joli salon) sauf que cela se traduit ici par une production chancelante, pas toujours capable de retransmettre l’énergie et la puissance de morceaux comme “Crash Test Rating” ou “I’m my own Doctor” qui ne manquent pourtant pas de charisme et de lignes vocales accrocheuses. Mais aucun doute que le groupe sera en capacité de corriger cet aspect par la suite, au regard de cette reconnaissance grandissante qui leur ouvrira sans doute les portes d’un studio de meilleure qualité. Sinon, on est évidemment enthousiaste vis à vis du talent du groupe pour écrire et composer de très bonnes chansons emo qui font honneur à leurs aînés, et on espère qu’il sera capable de s’en émanciper pour atteindre sa pleine maturité. Trouver sa place dans un mouvement aussi controversé que l’emo n’est pas forcément une chose difficile, mais ce que Remo Drive vient surtout de prouver avec ce premier album, c’est que si reconstruction il y a, il faudra nécessairement compter sur eux. Make Emo Great Again !


Morceaux conseillés : "Yer Killin' Me" ; "Crash Test Rating" ; "Eat Shit" ; "I'm my own Doctor"

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