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Critique d'album

Mark Lanegan


Straight Songs Of Sorrow


(08/05/2020 - - - Genre : Rock)
Produit par

1- I Wouldn't Want To Say / 2- Apples From a Tree / 3- This Game of Love / 4- Ketamine / 5- Bleed All Over / 6- Churchbells, Ghosts / 7- Internal Hourglass Discussion / 8- Stockholm City Blues / 9- Skeleton Key / 10- Daylight In the Nocturnal House / 11- Ballad of a Dying Rover / 12- Hanging On (For DRC) / 13- Burying Ground / 14- At Zero Below / 15- Eden Lost and Found
Note de 4.5/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"Un album profond, habité et très personnel"
Maxime L, le 27/05/2020
( mots)

A peine 7 mois après la sortie de l’excellent Somebody's knocking , revoilà déjà un nouvel album de Mark Lanegan, Straight songs of sorrow . Si les fidèles du vieux loup américain sont habitués à la régularité stakhanoviste de ses sorties, ce douzième disque solo (le sixième en 8 ans) revêt un caractère particulier, car il parait conjointement à son autobiographie, sortie aux Etats-Unis sous le nom de "Sing Backwards and Weep".


Espérons d’ailleurs qu’elle soit un jour traduite en Français, tant cet artiste représente la quintessence du Rock Us, qui a traversé les styles, les générations, avec cette voix si reconnaissable, sorte de Tom Waits grunge, en un peu plus cabossé.


Depuis le premier album avec les Screaming Trees au milieu des années 80, le songwriter de 55 ans a bouffé à tous les râteliers  : grunge, stoner avec les Queens of the Stone Age, incursions électro avec les Soulsavers ou les Gutter Twins, folk décharné tendance « Belle et la Bête » avec Isobel Campbell ainsi que bien sûr, ses différents disques solo mêlant folk acoustique et blues sépulcral, tous portés par sa voix rocailleuse, usinée à grandes lampées de bourbon, et avec toute une tripotée de collaborations et d’amitiés cousues au fil des années, dont on retrouvera pas mal de traces sur ce disque.


Si l’album précédent Somebody's knocking était un finalement assez « anglais » dans ses sonorités, Mark Lanegan nous propose cette fois ci une oeuvre bien plus "américaine", mais surtout plus personnelle, nous contant ses souvenirs tout au long des 15 titres présents ici.


Il est toujours "facile" d’imaginer les musiciens de rock en artistes maudits rongés par les excès en tous genres, mais lorsque l’on se penche sur le parcours de Mark Lanegan, on est assez loin de la vraie vie de rockstar, du strass et des paillettes de façades, et force est de constater que s’il est encore en vie en 2020, cela relève presque du miracle.


Mark Lanegan n’est pas une rock star. Il n’est pas non plus un héros. Mais il est à coup sûr un survivant. Survivant de ses propres addictions : vingt années d’alcoolisme dont il a su réchapper, et ce disque est aussi une façon de crier au monde « Oui, je suis encore là, et je vais vous raconter en quoi c’est miraculeux.


Straight songs of sorrow s’ouvre sur « I wouldn’t want to say », titre qui ressemble presque à un trait d’union avec l’album précédent : électro, avec une ambiance que ne renierait pas Depeche Mode. Nous sommes en terrain connu, mais on retrouve dès le second morceau, « Apples from a Tree », le Mark Lanegan bluesy et écorché de Blues Funeral  sa voix sur le fil du rasoir, jonglant avec les délicats arpèges de Mark Lorton, guitariste de Lamb of God, et premier Guest de ces mémoires sonores.


S’il est sans doute difficile émotionnellement de mettre sa vie en musique, l’écriture de sa biographie a été un long chemin de croix pour Mark Lanegan. Il le raconte d’ailleurs dans les différentes interviews (notamment dans Rolling Stone France) : « Écrire ce livre a été la chose la plus déplaisante que je n’ai jamais fait ». Parce que ça l’a ramené à ses années d’errance et des addictions, et sans doute aussi que ça l’a mis face à lui même et aux erreurs qu’il a pu commettre.


Ecouter cet album, c’est aussi être face aux épreuves traversées par l’artiste, comme ce funeste matin d’avril où il ne daigne pas répondre à l’appel de son ami Kurt Cobain. La suite, on la connaît, et il a fallu à Mark Lanegan toute la résilience du monde pour enfin faire le deuil de sa culpabilité. Certains titres respirent cette noirceur, cette introspection difficile mais néanmoins nécessaire. « Churchbells, ghosts » est de cette trempe, quelques note de piano sépulcrales, une ligne de basse surgrave (que l’on doit à Jack Bates, fils de Peter Hook, bassiste de Joy Division).


Le climax de cette ambiance mélancolique étant atteint par deux morceaux d’une gravité et d’une beauté sans nom. D’abord « Stockholm City Blues », de loin la plus poignante du disque, sorte de plongée dans les tréfonds de son expérience de junkie "I paid for this pain I'm runnin' through my blood, You couldn't ever tell me when enough's enough, To trade a few more nickels for another nail, Don't let my will give out before my body fails ».


Ensuite « Skeleton key », où les paroles sont tout autant déchirantes, "Ugly, I'm so very ugly I'm ugly, inside and out, there's no denyin’, Love me, why would you ever love me?, No one has ever loved me yet, pretty baby ». Ce « Skeleton key » est d’autant plus remarquable, qu’il est le morceau sorti en avant première en guise de « single », qui s’étend sur 7 minutes, lentes et illustrant brillamment la descente aux enfers de Lanegan.


Le reste du disque est en tous points remarquable, et pavé de collaborations très inspirées, on pense notamment à "This Game of Love », chanté en duo avec sa femme Shelley Brien, qui ferait presque passer la voix de Marianne Faithfull pour Farinelli ou « Bleed all over », sa boite à rythme un peu désuète et sa ritournelle très catchy où la voix rocailleuse de Lanegan fait une nouvelle fois des merveilles.


Bien aidé par le producteur et ami Alain Johannes (bien connu pour graviter autour de la sphère stoner), la production de l’album est excellente, rehaussée par les interventions de guests et amis, qui vont bien au delà du simple fait d'avoir « un nom » au générique ; comme par exemple sur le blues grognard « Ballad of a dying Rover » qui voit John Paul Jones y poser son mellotron en toute discrétion, ou sur le superbe « Daylight in the nocturne house », son ambiance amérindienne, ses orchestrations superbes et avec les guitares d’Adrian Utley de Portishead.


Sans rentrer dans le détail de chaque chanson, outre les invités déjà évoqués, on retrouve également au casting Ed Harcourt, Warren Ellis (comparse de Nick Cave, autre ami de Lanegan) ou encore Greg Dulli des Afghan Whigs (et des Gutter Twins) qui viennent épauler et apporter leur bienveillance au vieux grizzly qu’est Lanegan.


On pourra sans doute lui reprocher sa longueur (1 heure pour 15 titres), mais il fallait bien cela pour accompagner son parcours durant ces années 90. 


Et si son autobiographie fût difficile à écrire, ce qu’il raconte encore dans ses entretiens promotionnels : "Tout ce que j'ai obtenu, c'est une boîte de Pandore pleine de douleur et de misère. Je suis entré et je me suis souvenu de merdes que j'avais mises de côté il y a 20 ans. Mais j'ai commencé à écrire ces chansons à la minute à laquelle j’ai terminé (le livre), et j'ai réalisé qu'il y avait une profonde émotion car elles étaient toutes liées aux souvenirs de ce livre ».


Sans doute convient il d’appeler cela un mal nécessaire pour tirer un trait sur le passé, davantage que pour en faire le bilan. 


Straight songs of sorrow n’est sans doute pas l’album le plus facile pour découvrir l’artiste, mais il n’en est pas le moins important, compte tenu de son caractère « testamentaire ». 


Gageons qu’aujourd’hui, Mark Lanegan est délivré de tous ses démons, sobre depuis 20 ans, possède sa propre maison, « ce qu’il n’aurait jamais imaginé avant », et fort heureusement, il est enclin à nous proposer encore de superbes disques, le plus longtemps possible.


 

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