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Critique d'album

Lynyrd Skynyrd


(Pronounced 'Leh-'Nérd 'Skin-'Nérd)


(13/08/1973 - MCA Records - Rock sudiste - Genre : Rock)
Produit par

1- I Ain't The One / 2- Tuesday's Gone / 3- Gimme Three Steps / 4- Simple Man / 5- Things Goin' On / 6- Mississippi Kid / 7- Poison Whiskey / 8- Free Bird
Note de 5/5
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Note de 4.5/5 pour cet album
"L'hymne des derniers rebelles"
François, le 29/03/2022
( mots)

La mort de Duane Allman n’avait pas signifié la fin de partie pour les Allman Brothers, mais cela avait indéniablement causé une baisse d’inspiration dans la composition. Les fondateurs du rock sudiste demeureraient une référence éternelle pour toute la scène, mais ils n’étaient plus capables d’atteindre les sommets franchis depuis la fin des 1960’s. De toute façon, une nouvelle génération était déjà en place, prête à renouveler le Southern Rock de fond en comble.


Depuis la Géorgie, vieil Etat des Treize colonies, le rock sudiste originel conserve un goût de pêche et d’orange, il est plus suave et doux, regarde beaucoup vers le blues et la country, l’americana voire même le jazz. La virtuosité est déjà de mise, les musiciens y sont excellents, mais il y a de nombreuses différences entre cette première école, celle des Allman Brothers, et la nouvelle scène floridienne en pleine gestation. Son acte de naissance est à situer en 1973, il s’intitule (Pronounced 'Leh-'Nérd 'Skin-'Nérd).


Avec son premier album, Lynyrd Skynyrd allait marquer les esprits, en partie à cause du titre censé expliquer la prononciation d’un nom de groupe à l’orthographe étonnante, hommage moqueur à un professeur qui détestait les toisons trop longues. D’ailleurs, ils s’étaient auparavant appelés Leonard Skinnerd, puis Lynard Skynard pour éviter tout problème avec l’individu, avant de multiplier les "y" ; si on remonte le temps, depuis le milieu des années 1960, on peut trouver les prodromes du groupe sous des noms variés, de My Backyard (l'origine des "y" ?) à One Percent (référence au 1% de clubs de motards criminels).


Néanmoins, de cette première époque, on retiendra surtout les pérégrinations locales d’un groupe de reprises parcourant les pubs, clubs et établissements scolaires, dont les quelques compositions se détachent finalement peu du lot (écoutez "Need My Friend", la touche sudiste est bien présente mais nous sommes à des années lumières de la qualité de premier opus). A noter que de 1970 à 1971, Rickey Medlocke, futur membre fondateur de Blackfoot (autre gros nom de la scène sudiste de Jacksonville), était de la partie.


Cette très longue gestation permet au groupe de commencer à se faire un nom localement, de gagner en maturité, d’avoir quelques morceaux dans son sac et de créer une certaine osmose entre les membres. Il faut s’en rappeler pour comprendre l’immense qualité de leur premier album.


Lorsqu’arrive le moment de gagner les studios du producteur Al Kooper, le groupe était stable depuis 1972 avec Ronnie Van Zant, au chant tellement caractéristique, les deux virtuoses Gary Rossington et Allen Collins à la guitare, Bob Burns à la batterie, et Billy Powell, ancien roadie qui s’était révélé talentueux au piano. Un changement brusque est notable, l’arrivée d’Ed King à la basse après avoir quitté les Californiens de Strawberry Alarm Clock, pour remplacer Leon Wilkeson confronté à un manque de confiance paralysant (il reviendra à son poste après l’enregistrement, tandis qu’Ed King sera le troisième guitariste du groupe). 


Mais si Lynyrd Skynyrd a marqué les esprits, c’est avant tout pour avoir publié un chef-d’œuvre en guise de premier essai, et d’avoir ainsi révolutionné le Southern Rock. Pour cela, il faut penser au contexte plus large et rappeler qu’au-delà de quelques précurseurs du Michigan, la vague Hard-rock est arrivée à rebours aux Etats-Unis, à peu près dans les années 1973-1974 avec comme chefs de file Aerosmith, Blue Öyster Cult, Montrose ou encore, dans sa version sudiste, Lynyrd Skynyrd. C’est la première innovation fondamentale apportée par le groupe au Southern Rock : il gagne en saturation et en énergie une fois développé en Floride. "I Ain’t The One" avec ses riffs appuyés et rythmés, la voix rauque suintant le sud profond, "Poison Whiskey" qui n’est pas loin d’un Deep Purple par moment : on perçoit sans problème la distance prise avec les Allman Brothers


Bien sûr, ce premier opus transpire encore le flegme du Saloon, de Tulsa et de la country ("Mississippi Kid", "Things Goin’ On") ainsi que les restes de l’inspiration venue du rock anglais, dont le répertoire était repris par Lynyrd Skynyrd dans les années 1960 (le côté Rolling Stones de "Gimme Three Steps"). Mais c’est aussi cela, le rock sudiste, un mélange saturé des diverses racines esthétiques qui parcourent le sud des Etats-Unis.


L’autre élément essentiel qu’inaugure ce premier opus, c’est l’invention de l’hymne sudiste. Bien sûr, le mélancolique et magnifique "Tuesday’s Gone" ou encore l’inégalable "Simple Man", ode aux valeurs familiales et simples de la région, sont des moments forts de l’album qui s’imposent à l’auditeur. Mais le titre paradigmatique est évidemment "Free Bird", avec ses slides au bottleneck sur fond de piano, sa douceur nostalgique, puis sa deuxième partie qui accélère les choses avec un riff endiablé afin d’annoncer le solo, en twin-guitars et au piano, d’une virtuosité impressionnante. Ce type de morceau est paradigmatique du genre au point de devenir un point de passage obligé pour tous les grands noms de la scène, des Outlaws ("Green Grass and High Tides") à Blackfoot ("Highway Song") en passant par Doc Holliday ("Lonesome Guitar"). Le modèle est clairement reproduit, tandis que "Free Bird" est devenu culte au point d’irriguer la culture populaire des décennies plus tard, comme, de façon sublime, en conclusion du film The Devil’s Rejects de Rob Zombie.


Si le rock sudiste trouve ses origines chez les Allman Brothers, c’est la version floridienne et saturée de Lynyrd Skynyrd qui a fini par imposer les codes du genre après les avoir renouveler en 1973. Le grand public connaît davantage ce style dans sa déclinaison skynyrdienne. Dès lors, la scène s’est partagée entre les épigones de Lynyrd Skynyrd, la face musclée du genre, et les héritiers des Allman Brothers, la face plus douce. Bien sûr, toutes les combinaisons sont possibles et aucun conflit esthétique n’est à déplorer. Peut-être, à l’époque, un combat entre le monopole sudiste de Capricorn et l’arrivé de MCA, mais qui travaillerait pour MCA ?


A écouter : "Tuesday’s Gone", "Simple Man", "Free Bird"

Commentaires
Daniel, le 29/03/2022 à 21:43
En 1973, les petits rockers étaient prêts à affronter ce qui allait être une des plus belles années du rock progressif. Nous n'avons évidemment rien compris à cet album. Je me demande même s'il est sorti dans la distribution générale ou s'il a été réservé aux seuls disquaires spécialisés dans les fameux "imports". Quand j'écris "rien compris", ce n'est pas une formule vaine. Un nom imprononçable, un logo bricolé avec des ossements, un titre pire encore, une pochette un peu foireuse, une musique qui nous semblait déjà anachronique et une haine invétérée du Johnny Walker étiquette rouge que, pour notre part, nous découvrions avec ravissement (et quelques expériences malencontreuses). En extrême résumé, l'opus est passé tellement loin de nos préoccupations du moment qu'il ne s'est trouvé parmi nous que quelques très rares cinglés pour en vanter les mérites. Il a fallu beaucoup de temps pour nous comprenions le groupe. Jusqu'à l'adorer. Aujourd'hui, il y a Blackberry Smoke qui tourne sur les platines. Le retour de la vengeance du rock sudiste. Être libre comme un oiseau, les ami.e.s ! Lynyrd Skynyrd : à prononcer "Lynyrd Skynyrd !